mercredi 29 décembre 2010
http://videos.arte.tv/fr/videos/pass_pass_theatre-3604642.html

Je précise que la pièce a, hélas, subi des coupes, afin de respecter le "format" du programme, et que c'est fort dommageable. Cela dit, l'esprit est, je le crois, respecté et j'ai retrouvé les émotions ressenties lors des représentations et des répétitions. La pièce était assez forte pour subir un passage à la télévision. Et elle le doit à son metteur en scène très talentueux (que j'aime de tout mon coeur) et à une équipe magnifique, très soudée, qui constitue une sorte de famille au meilleur sens du terme. 
En revanche, je demeure très réservée quant au documentaire, notamment en ce qui concerne la présentatrice qui énonce avec un immense sourire une énorme bêtise, dès l'introduction, concernant l'âge de Peter Pan... Et ce n'est pas faute de lui avoir expliqué... Le documentaire, en lui-même, est assez décevant, de mon point de vue, si l'on tient compte de toute la matière qui avait été offerte au réalisateur : pas de fil conducteur serré, éléments contradictoires, pas de mention de l'auteur de la pièce (mon ami Andrew Birkin), et à peine Barrie est-il nommé... 


mercredi 15 décembre 2010
Je n’ai jamais perdu la mémoire de l’enfance.
Je n’ai jamais perdu la mémoire de l’enfance, parce que je n’ai jamais été un enfant. 
Je n’ai jamais perdu la mémoire de l’enfance, parce que je n’ai jamais cessé d’être un enfant. 
Je ne sais pas ce qu’est l’enfant. Je sais ce qu’il n’est pas. 
Je sais simplement quel cœur, quel esprit et quel abîme je portais en moi lorsque j’avais l’âge d’être cet enfant. 
De cette nuit éternelle, indistincte et sans fond, je sentais palpiter le cœur de l’abîme, et j'avais dans ma bouche le goût de cette eau sourde et profonde, cette salive de mort ardente. 
Mais le temps n’est pas lorsqu’on est éternel et, lorsqu’on ne l’est plus, il coule en nous. 
L’éternité est une mémoire sans souvenirs. 
L’enfance est désormais une fiction pour ce double dénaturé de l’enfance : l’ogre adulte qui se repaît des heures et de la chair de l’enfant poète. 
Aujourd’hui, seule la révolte me sied. Seuls la guerre et le crime m'importent. Il n'y a rien de vivant sinon cette violence nécessaire contre soi-même et les autres : le désir. Les gens qui implorent le calme et l’immobilité me dégoûtent. Ils puent la mort. Il n'y a, en ce monde, absolument aucune raison d'être en paix. Être en paix, c'est abdiquer notre raison d'être la plus pure, notre pure raison d'être. Vivre, c'est fouetter au sang nos plus grands remords. 
Il me fallait de l'irrémédiable pur. Il me fallait ressentir en moi le galop de l'effroi. 
Que l’on ait eu une enfance heureuse ou terrible, peu importe, car ce qui compte, c’est le pouvoir de régénération propre à cette époque des possibles infinis et presque inhumains, pouvoir dont on a été dépossédé, qui s’évanouit peu à peu avec le temps, par le fait de l’expérience, du vécu et de la découverte de ces deux monstres que sont l’échec et la peur. Ce pouvoir, cette chutzpah, ce sens de la réconciliation de soi à soi s’écoule goutte à goutte pendant l’enfance sans que rien ne puisse mettre un terme à cette hémorragie. Ce qui est réellement perdu (« wasted » autant que « lost »), c’est toujours simplement le désir réel, celui qui ne peut s’exprimer que dans ce présent éternel des enfants, qu’ils sont les seuls à vivre, à percevoir et à gaspiller sans états d’âme. L’innocence que l’on attribue aux enfants n’est peut-être que cela : une sauvagerie à nulle autre pareille qui consiste à mettre en pièces le monde des adultes. [Et je songe à la magnifique adaptation du classique de Sendak par  Spike Jonze...] 
On peut bien trouer l’univers des enfants,  accabler leurs constructions imaginaires de tous les maux, ils finissent toujours par faire ressusciter leurs mythes intimes, ceux dont ils ont réellement besoin pour construire leur identité. Ils y parviennent toujours, jusqu’au jour où le prodige définitivement prend fin : le mythe se fane, s’effrite puis s’effondre, tombe en poudre, mais il demeure le socle sur lequel s’élève le sujet dépouillé des attributs de la royauté de l'enfance. Peut-être que cela n’advient pas brutalement, peut-être ne sont-ils pas attentifs aux prodromes du changement, mais un beau jour ils se retrouvent les mains vides et les ponts entre le château d’enfance et leur être sont à jamais brûlés. Pour la majorité d’entre eux, en tout cas. D’autres, à la fois bénis et maudits, demeurent pris, pour une part, dans ce présent éternel dont rien ne viendra jamais les sevrer. Les artistes appartiennent à cette catégorie de maudits magnifiques ; car il y a bien pire que grandir (et accepter, in fine, de guerre lasse, de mourir et d’épouser notre destin d’homme), c’est ne jamais expérimenter la perte et de vivre dans l’illusion du possible-phénix. Pour aimer parfaitement, il faut perdre totalement l’objet aimé, qu’il soit réel, matériel ou une simple construction imaginaire. Le tragique, c’est que le grandir implique l’impossibilité du retour en arrière, vers ce paradis si bien mis en vers par Wordsworth, mais que le non-grandir comporte lui aussi une malédiction peut-être encore plus grande : devenir une caricature de soi-même, un automate à l’intérieur d’un vivant de façade. Faire vivre ce petit royaume, caché dans la grande demeure de l’adulte est toute la difficulté de l’adulte fait, son œuvre et le seul mérite que l’on puisse réellement lui attribuer. Il faut que l’éternité du présent de l’enfance tienne dans la temporalité de l’adulte ; il faut que la sensibilité et l’instinct commandent à l’intelligence, sans néanmoins neutraliser cette dernière. Certains êtres sensibles, certaines trempes d’artistes ratés ne sont guère profondes ni solides car elles appartiennent à des êtres incapables de distinguer la fiction créatrice du mensonge fait à notre nature, c’est le refus pur et simple du réel, cette mauvaise foi terrible qui consiste à nier la raison pour n’exaucer que les vœux du cœur ardent, celui qui a la foi ; d’autres usent de la raison comme d’une déesse et vampirisent la sensibilité à son profit. Je ne sais lequel de ces deux genres de personnalités est le plus à plaindre et la plus stérile. Il faut la communion de ces deux facultés et l’imagination fait la navette entre les deux. En cela, je demeure très kantienne. En cela, j’ai accepté d’être mère.



Fatalement, cela devait donc se terminer ainsi. 




{Clin d'oeil à ma très chère amie Virginia, qui sait pourquoi...} 

Nous sommes donc mère, chère Holly G. / Céline, et nous ne sommes point différente. Personne ne change. On ne fait que développer ses potentialités autour d'un irréfragable centre de gravité. On découvre peu  peu une identité, la sienne. Une identité et ses leurres. 
Il n'y a pas de métamorphose. J'étais déjà celle que je suis lorsque j'étais une enfant. 
Le monde est simplement plus large sur les bords et, surtout, bien plus dangereux. J'annexe une toute petite île à l'autre, celle qui me porte, celle que je suis... Je signe mon arrêt de mort également. 
C'est l'une des plus grandes aventures de mon existence. Non ! Une pure folie ! Et je jouis d'elle à chaque heure du jour et de la nuit. Je suis invincible. Je suis heureuse. Je me découvre autant mortelle qu'immortelle, car j'ai enfin accepté de perdre mon éternité. 
J'ai toujours su que la naissance et la mort étaient jumelles et revendiquaient l'une et l'autre leur tribut, tôt ou tard. M. Golightly et moi-même, nous l'avons presque payé comptant le jour de la naissance de cet enfant, né sous les auspices de James Matthew Barrie, qui pour une fois s'est trompé - de peu, de justesse, cependant... : 
« Que la mère doive mourir au moment même où l’enfant paraît enseigne, je pense, une grande leçon de sérénité. C’est comme s’ils se frôlaient pendant leurs voyages : quand l’un vient, l’autre part. Comment ne pas les entendre se saluer ? La naissance et la mort sont les voyages pendant lesquels nous sommes le plus confiant ; nous ne le sommes jamais autant dans l’intervalle ; tout semble si facile au début et à la fin. » (Trad. C.-A. F.)
Nous sommes donc mère (et père, cher M. Golightly...) et cela ne change rien. Nous sommes les mêmes mais différemment. 
Ainsi, nous pourrons continuer à médire des mères sans que l'on nous accuse, désormais, d'être aigrie ou frustrée de ne point avoir d'enfants... Nous pourrons parler en connaissance de cause, sans trahir, toutefois, la clique des Enfants Perdus, car nous en sommes et en serons toujours. Cette fraternité s'écrit avec le sang de l'imaginaire et le souffle des âmes abandonnées. J'ouvre la main et j'aperçois cette ligne de vie coupée court qui, soudain, s'anime, se prolonge, m'échappe et vient mourir ou naître dans cette autre main, sa petite main...


***
Ces quelques lignes, qui constituent une faire-part, doivent être lues en écoutant ceci – comprenne qui pourra...


Et, si je n'ai point le temps de vous écrire un billet digne de ce nom avant Noël - car je me suis déjà remise à mon travail barrien et ne désire point être une mère au rabais -, je vous souhaite à tous et à toutes un merveilleux 25 décembre
Amis d'ici et d'ailleurs, de France, d'Angleterre, de Grèce..., je vous remercie également de tout l'amour que m'avez manifesté, pendant cette attente, avant et après la délivrance





{Merci à Lily pour ce Nid de Grives si parfaitement trouvé...}


{Merci à Alice pour ses délicates attentions, sans cesse renouvelées...}

mardi 2 novembre 2010
Même si mon coeur de cinéphile appartient depuis longtemps à l'incomparable Cary Grant, James Stewart et Gary Cooper figurent eux aussi (loin derrière Cary, tout de même) parmi les acteurs que je chéris depuis toujours, et ce, pour toujours. Aucun acteur de mon époque, n'a su m'inspirer autant que ce trio. Bien sûr, je vénère un Charles Denner (sa voix est à jamais incrustée en moi), ou aime inconditionnellement un Alain Delon (et pas seulement pour Le Guépard !), un Gérard Depardieu (à une époque où il est, hélas, de bon ton de le répudier) ou un Clint Eastwood, par exemple, mais l'attachement que je conçois et l'admiration que je ressens pour ceux-ci se situent à un tout autre niveau. Ils sont réels, tandis que Cary, James ou Gary n'existent pas : le premier l'avait parfaitement compris en déclarant, sur le ton de la boutade : "Tout le monde veut être Cary Grant. Y compris moi..." Ils n'existent pas, car ils sont des êtres rêvés. L'incarnation en nous, au sein de notre vie, de ces êtres faits de silence et de lambeaux de paradis ou d'enfer a toujours un prix : une livre, non pas de chair, mais une livre d'âme et la rencontre avec la mort. Il faut que quelque chose de solide meure ou vacille en nous pour autoriser cette rencontre-là.

La nature d'un être rêvé est celle de l'intangible. Leur mode d'existence – ou d'inexistence – fait appel à ce qui se tapit dans les profondeurs de notre âme : notre insatiable besoin de divinité et notre invincible terreur à l'idée de manquer de courage si d'aventure nous avons moyen de la rencontrer.
Un rêve est toujours une histoire, une fiction, un roman que l'on écrit. Une énigme, certes, la plupart du temps, mais néanmoins une histoire, au sens le plus banal que l’on donne à ce mot.  Pourtant, le rêve ne parle pas tout à fait le langage prosaïque des hommes éveillés : il est une variation d’or sur le désir et son langage, qui est intraduisible en mots et en concepts, mais s’exprime au moyen d’images persistantes, aheurtées et fascinantes. Les êtres rêvés ressemblent aux personnages de fiction (celle des autres) dont on peut tomber amoureux. Cet amour est bien étrange puisqu’il exclut toute réciprocité. L’amour parfait, en somme ! Sauf, peut-être, que l’on n’aime jamais que son reflet à travers l’être rêvé qui devient le miroir de nos fantasmes et de nos impuissances… J’ai toujours imaginé que les rêves étaient de l’essence des simulacres lucrétiens (De Natura Rerum, IV, 34-45) Les rêves sont – il n’y a aucun doute là-dessus – des amours mortes ou des fragments de sentiments qui n’ont pas pu trouver en nous assez d’espace et de temps pour nidifier et arriver à maturité, jusqu'à l'incarnation. Parfois, les êtres humains, glissent  dans le ventre des livres des fleurs qui sèchent à l’intérieur, coincées entre deux pages. Il est à supposer que cet usage subversif et plein de cruauté présente des attraits pour les personnalités un tant soit peu romantiques. Les hommes agissent souvent sans raison, sans utilité. Tels sont les hommes.  Mais les rêves sont des sortes de fleurs séchées et nos romans de vastes herbiers.
Il m'arrive souvent de conserver certains films, de veiller jalousement sur leur statut d'inédits, pour les jours de disette ou simplement en guise de cadeau que je désire me faire en vue de certains jours de fatigue. Ainsi, j'ai découvert ce film réalisé par King Vidor il y a seulement quelques jours, alors qu'il figurait en bonne place dans ma filmothèque (assez conséquente, puisqu'elle abrite près de 2000 titres) depuis quelques années déjà. Le scénario fut écrit par Edwin Knopf qui s'inspira d'un couple d'amis célèbres, Zelda et Francis Scott Fitzgerald... afin de croquer les personnages de Tony et de Dora. Une version antérieure du film s'appelait Broken Soil et les deux personnalités littéraires étaient clairement identifiées sous le nom de Zelda et de Scott Fitzpatrick. Knopf et Vidor connaissaient intimement le couple et, même si d'immenses différences existent entre le premier scénario et le dernier, il demeure quelques traces de cette inspiration.
À ma connaissance, ce film n'existe qu'en zone 1 (mais il est très facile de l'acquérir et de rendre son lecteur de salon compatible ou d'en acquérir un multizone – cela présente un indéniable intérêt puisque certains très anciens films ne sont édités qu'en zone 1 et il y a fort à parier qu'ils ne le seront jamais en zone 2... Je pense notamment à certains films pré-code Hays).


Gary Cooper interprète le rôle d'un homme (Tony Barrett) un peu désinvolte, gâté par de trop favorables circonstances, qui survole l'existence en vulgaire dilettante et agit comme s'il ne s'agissait jamais que d'une fête perpétuelle. Il est écrivain, a obtenu quelques succès que l'on devine faciles et, très logiquement, il ne doute de rien : tout lui est acquis et seul les plaisirs éphémères lui importent. Mais ces êtres trop frivoles dissimulent souvent une faille tragique, on le devine aisément, car nous avons tous rencontré, un jour ou l'autre, dans le monde réel, ce genre de personnages taillés dans une étoffe trop lâche. Leur frivolité n'est alors que l'épais manteau de la lucidité et du désarroi qui ne protège qu'en apparence, et seulement un temps, des diverses tempêtes de l'existence. Nous sommes faits – les meilleurs d'entre nous – pour le climat de la tragédie, dans l'attente que le temps arrache, morceau par morceau, notre écorce d'être au monde. 
Le film débute au sein d'une immense party, où, comme il se doit, l'alcool coule à flot. Gary / Tony a envoyé une droite bien sentie à l'un des invités qui a eu l'outrecuidance d'émettre des réserves quant à la qualité de son dernier manuscrit, juste avant que son éditeur ne vienne en personne lui signifier qu'il refuse de publier ledit manuscrit et attend de lui qu'il écrive enfin un livre digne de ce nom !
Tony est à peine blessé dans son orgueil : ce qui lui importe le plus est, très prosaïquement, le manque à gagner : il a déjà dépensé l'argent avant de l'obtenir...
Le héros de cette histoire est marié à une femme (Dora) qui apparaît tout d'abord, et ce, jusqu'aux derniers moments du film, comme une fille un tantinet écervelée, qui ne songe réellement qu'à l'amusement (et, contrairement à son époux, elle ne semble point dissimuler de profondeur) ; il s'agit donc de ce que, communément, on nomme une gold-digger. L'argent venant à manquer, puisque l'auteur soudain déchu comptait sur le dernier manuscrit pour les renflouer, le couple est contraint de revenir dans la demeure familiale (celle des "Ancestors") et déserte de Tony, au grand dam de sa femme, qui hait la campagne (tout comme moi...).
Rapidement, le couple rencontre leurs voisins polonais qui leur font d'emblée une offre attrayante : acheter un champ (au-dessous de sa valeur), proposition qu'ils s'empressent d'accepter – même si, après l'enthousiasme premier, Tony semble plus réticent que sa femme à se séparer d'un bien familial. Tony remet l'intégralité de la somme à Dora et l'épouse désinvolte s'empresse de  repartir à New York afin de dépenser sur-le-champ les 5000 dollars ainsi acquis, tandis que l'écrivain, étrangement, choisit de demeurer sur place afin d'écrire son nouveau roman. 
Les adieux sont enjoués et la séparation semble soulager les deux protagonistes. Il y a tant de couples qui vivent de la sorte. Je ne ressens que mépris pour ces pisse-froid, capables de tenir bien droit entre les marges d'une vie sans passion, circonscrite par de rassurantes habitudes.
Entre-temps, Tony a découvert les curieuses moeurs de cette famille polonaise, qui cultive le tabac, et s'est délecté en leur compagnie d'une "prune soup". Amusé par ce qui lui semble être des bizarreries de la part de ses hôtes, il finit pourtant rapidement par comprendre qu'il est l'étranger au sein de cette enclave polonaise. Ses manières provoquent le rire de l'assemblée (il fait preuve de courtoisie envers les femmes, qui sont traitées comme des marchandises et des bêtes de somme, sans qu'il leur vienne à l'esprit de se rebiffer) et c'est lui qui, contre toute attente, devient un objet d'étude et de railleries. Il tente de se mettre au diapason en adoptant leurs façons (la serviette de table sous le cou, par exemple). La scène du repas est édifiante à cet égard, puisqu'elle cristallise les différences entre ces deux mondes et leur système de valeurs.
Très rapidement, à la faveur d'une livraison matinale de lait, le héros, abandonné par sa femme, puis par son domestique chinois, et en proie aux affres d'un foyer qu'il est incapable de tenir, se lie avec la jeune fille de la famille polonaise – Manya (l'actrice Anna Sten que Cooper surnommait Anna Stench* tant il la détestait).
Celle-ci, dotée d'une forte personnalité, ne se laisse point séduire par les manières de cet homme, qui tente de badiner avec elle. Il recevra une retentissante gifle – que l'on pourrait croire être les prémices d'un baiser, mais ce n'est pas (encore) le cas. 
Elle n'est nullement impressionnée par le rôle qu'il se donne, celui d'écrivain, et lui fait remarquer qu'il n'y a aucune différence entre le fait de tirer sa subsistance de l'écriture et le fait de travailler la terre ; elle le met au défi d'écrire quelques chapitres, avant qu'elle ne consente à lui livrer de nouveau le lait, chaque matin. 
Piqué au vif, mais surtout inspiré, Tony se lance dans l'écriture d'un livre dont l'héroïne, Sonia, ressemble étrangement à notre jeune Polonaise. 
Et, plus le livre s'écrit, plus Tony écrit son propre rêve, plus il en devient à la fois la proie et le maître. Le miroir et le reflet. 
N'est-ce pas le propre de tous les écrivains ? Il faut écrire à l'intérieur d'un rêve palpitant dont on maîtrise les contours, dont le coeur rivalise d'ingéniosité avec la vie réelle lorsqu'elle est sublimée, lorsqu'on lui demande l'impossible, une vie dont les personnages sont les fils de notre inconscient propre et de l'éternel humain – l'universelle tentation de l'Ailleurs et de l'Autre. 
Très subtilement – le scénario aurait pu, cependant, davantage s'appuyer sur cette idée qui n'est pas assez développée ni davantage exploitée –, le roman de Tony devient une image de la psyché des personnages : Tony y livre son désir pour cette jeune fille, Manya découvre la femme affranchie de la tyrannie paternelle qu'elle pourrait devenir et, plus tard, Dora y lira l'amour de son mari pour cette autre femme et la ruine de leur union.
Manya a été promise (vendue) par son père au fils d'un voisin, un grossier lascar qui courtise les filles en tuant des porcs devant elles pour les divertir... 
Le promis n'éprouve aucun sentiment pour la jeune fille, mais accepte l'union, car il acquerra le champ vendu par Tony (quelle ironie !), une maison et une bonne à tout faire, corvéable à merci : sa future femme. La jeune fille tente de refuser ce mariage à tout prix, mais le père la soumet brutalement à son autorité.
Une nuit de blizzard, Manya et Tony vont se retrouver seuls au monde, prisonniers dans la maison de l'écrivain. La nuit de noces, véritable, d'où le film tire son nom est celle-ci et non celle qui doit suivre le mariage de Manya et de son prétendant. Une nuit de noces rêvée, détachée des corps, de l'espace et du temps. Mais, paradoxalement, une nuit vécue
Tony et Manya, sans mot dire, dans un simple effleurement des lèvres, reconnaissent implicitement leur attirance. Non, leur amour, celui qui est forclos, qui rend impuissant jusqu'au songe de lui-même. 
Avec une infinie délicatesse, une pudeur qui semble aujourd'hui, hélas, bien surannée, les deux êtres vont se reconnaître sans que l'union soit scellée autrement que par des regards. Les âmes communient et les corps se taisent.
Le lendemain matin, le père viendra rechercher son bien (sa fille), furieux, puisque celle-ci s'est déshonorée aux yeux de toute la communauté, quand bien même celle-ci est demeurée aussi pure que la veille. 
Le patriarche décide donc de précipiter le mariage, de peur que le prétendant ne change d'avis, de peur que la jeune fille ne soit ravie par Tony.
Manya n'épouse pas encore son destin. Mais ses larmes n'y peuvent rien et sa mère de lui dire que les femmes polonaises pleurent "à l'intérieur" et qu'il faut bien se résoudre... 
Lorsque Manya rendra visite en cachette à Tony pour lui annoncer que le mariage doit avoir lieu le lendemain, elle se retrouvera face à l'épouse, revenue de manière fort inopportune. Cette dernière, sans aucune élégance, après avoir lu le manuscrit de son mari et compris qu'elle avait perdu son mari, va tenter d'éloigner Manya en effleurant la corde morale et en faisant montre d'une confiance en Tony qu'elle est bien loin de ressentir. L'épouse fait éprouver à l'aimée de la honte pour son sentiment. Et seul ce sentiment pouvait la perdre, parce que le rêve n'a qu'un ennemi : le doute. 
Seulement à cet instant, Manya renonce vraiment. 
Le mariage a lieu selon les rites consacrés de la communauté. 
Dora, songeant que le mal est fait, avoue à son mari la venue, la veille, de Manya et l'échéance du mariage. Tony se précipite à la fête qui succède à cette union et réclame le droit de danser avec la mariée. Tout peut se lire dans ce regard échangé. Et cette mèche vagabonde sur le front de Gary (sa petite marque de fabrique) est comme une larme. 
Nous pensions assister, depuis les premiers instants de ce film, à une comédie fluette et agréable, voire  à un aimable mélodrame, mais les derniers instants transforment ce film, qui aurait pu être anodin, en une tragédie véritable, qui choque autant qu'elle laisse désemparé. 
La nuit de noces est venue et Manya se refuse ou s'offre contre sa volonté à son époux. Celui-ci, blessé dans son orgueil, devine la raison de cette attitude et décide de se rendre à la maison de Tony afin de le tuer. Manya arrive la première et s'interpose entre les deux hommes, pour sauver celui qu'elle aime ; et, malheureusement, elle tombe dans l'escalier. 
Alors qu'elle est mourante, Tony lui avoue enfin son amour – le songe traverse la paroi du monde réel – et Manya lui dit, haletante, qu'elle a été contrainte à cette union. 
Il est trop tard. Il est plus tard qu'on ne le pense. Il est toujours trop tard. 
L'épouse prend une autre dimension à ce moment-là, se révélant à elle-même autre ; elle essaie de soutenir son mari, mais le glas a sonné : et pour elle et pour lui.
Imperceptiblement, ce petit film, fort imparfait, se métamorphose, peu à peu, en une histoire de rédemption qui émeut aux larmes : le héros est transfiguré par cette rencontre avec cette femme et brûlé par la pureté de chaque fibre de son être. Morte, elle ne cesse d'être vivante en lui, plus que jamais. Elle a irradié Tony et celui-ci refuse alors de rendre un dernier hommage à son cadavre, car elle vit en lui désormais. C'est ainsi que Tony devient un être sensible, accordé au la mineur des sentiments les plus nobles, ceux qui éclosent à bas bruit et nous font rencontrer (trop rarement) notre moi rêvé... 
Son regard au loin devine la silhouette fantomatique de cette jeune fille qui a traversé comme une ombre son existence, dont l'ombre a croisé et fracturé à jamais la sienne. 
 Elle le salue au loin. D'elle, il ne reste dans le monde réel que la membrane du rêve ou du simulacre, le coeur de toutes les histoires... La meilleure part du rêve, le velours des songes, ce tissu que bien peu d'êtres humains peuvent toucher. 
Et, Tony, avec un pauvre sourire, lui rend ce signe de la main qui signifie, peut-être, un adieu à cette peau morte d'homme qu'elle emporte avec elle, cette membrane déchirée dans laquelle il ne peut plus se réfugier, en proie à la cruauté du réel, à sa vérité... Tony est à nu et  à vif. Il a répudié les simulacres d'un monde frivole pour ceux de l'âme profonde. 
Il coïncide avec un destin. Il le détruit. Il devient ce qu'il est. 



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 Voir le film sur Youtube.

* "Puanteur" en anglais.

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Billet écrit en écoutant ce magnifique disque :
jeudi 14 octobre 2010
Très lentement, je mets à jour mes divers sites internet, entre deux pages d'un roman ou d'une traduction, le tout entrecoupé de divers projets théâtraux... et de quelques surprises littéraires que je prépare secrètement dans mon antre. 
Aujourd'hui, je vous renvoie simplement, si le coeur vous en dit, à certaine page pour y découvrir deux petites raretés musicales que je viens de déposer sur mon site Cary Grant – qui n'est pas encore véritablement né, faute de temps. Mais Cary Grant est presque aussi important pour moi que Barrie et j'ai l'intention de le prouver... Depuis des années, je collecte des documents et des pièces rares, qui sont autant de preuves de mon amour et de ma dévotion à l'un des plus grands acteurs de tous les temps. Je suis un être constant, aux passions multiples, mais d'une fidélité à toute épreuve à ces dernières. Je tiens fermement les rênes  et, jamais, je ne renonce avant d'avoir réalisé mes rêves, et ce, quoi qu'il advienne. Probablement que, de l'extérieur, certains m'imaginent comme un papillon ivre, voletant, affolé, d'un point à un autre, mais il n'y a rien de plus faux. Chacune de mes pensées et de mes passions, chacun de mes actes, est la perle d'un même collier. Il y a une cohérence en moi que bien peu perçoivent – en particulier, ceux qui attendent de moi que je fasse des choix. J'éprouve le besoin de préciser cet état afin, une fois pour toutes, que mes lecteurs (ceux qui ont la bonté de m'écrire et pour qui, d'une manière générale, j'éprouve de l'amitié) me pardonnent de n'avoir pas toujours le temps de leur répondre comme ils le mériteraient certainement. Parfois, je préfère laisser un courrier orphelin plutôt que de n'accorder que des miettes. Peut-être ai-je tort. Probablement ai-je blessé des êtres (qui attendaient trop de moi, et à qui, cependant, je n'avais rien promis), mais Holly n'est pas tout à fait Céline, et si la première oeuvre avec l'accord et toute la sincérité possible de la seconde, il me semble que le meilleur de moi est ici, dans mes divers sites, dans les livres que j'essaie de publier... et qu'il n'est guère utile de vouloir mieux me connaître. 
Louis-Ferdinand Célinemon autre versant – de même que Barrie avait une écriture dextre et sénestre, il me semble que ma persona a deux hémisphères – disait ceci, dans une lettre à l'une de ses amies : 
"Si on se laissait aller à aimer les gens qui sont gentils la vie deviendrait atroce. Je ne sais pourquoi mais ce serait ainsi. Il faut se raidir pour vivre."
Et ceci, dans Mort à crédit
"L'essentiel c'est pas de savoir si on a tort ou raison. Ce qu'il faut c'est décourager le monde qu'il s'occupe de vous.. Le reste c'est du vice."
J'ai toujours, plus ou moins consciemment, adopté ces préceptes dans ma vie, depuis l'enfance, probablement pour me défendre de la tendance inverse. Mais force est de constater que, de temps en temps, j'oublie ces règles d'hygiène existentielle.
Je me souviens d'une ancienne relation amicale, qui a beaucoup compté pour moi à l'époque, qui m'a même aidée à progresser, mais qui voulait, à tout prix, me soumettre au joug de la raison et de l'équilibre, me restreindre dans mon appétit, rogner sur mes possibles... et qui s'étonnait que l'on puisse se consacrer à Barrie et à Louis-Ferdinand Céline, priser Cary Grant et Hegel, aimer à la folie Bach et Michael Jackson... Il en est trop de ces tristes sires qui, jamais, ne comprendront que la vie n'est belle qu'entrelacée de mille fils - de fer, de coton, d'or ou prélevé sur une toile d'araignée – mais qui tous concourent à dessiner le même motif dans une existence. 
lundi 11 octobre 2010
"La vie n'est rien auprès de nos raisons de vivre..."





Albert Caraco est un drôle de type. Du genre que j'aime – et pas à moitié. 
Je ne remercierai jamais assez mon ami Pierre de m'avoir fait rencontrer ce livre.
Caraco ne cherche pas à plaire et le lecteur sait d'instinct qu'aucune prise réelle sur lui n'est possible : il demeure sur une île taillée à ses seules dimensions, inaccessible à ce que le reste du monde peut bien penser de lui. Ce n'est pas une pose ; il y a une liberté absolue chez lui qui ne peut qu'indisposer le plus grand nombre. Je suis certaine que la plupart des lecteurs diront qu'il est un homme du ressentiment, aigri, malheureux, malsain, etc., sans jamais avoir le soupçon qu'il est simplement au monde comme un naufragé, séparé des autres comme de lui-même. Et même bien plus de lui-même que des autres. 
Il sait vivre, lui !
Là où (mon très cher et estimé) Cioran, par exemple, fait montre d'une irrésistible drôlerie, Caraco est dépourvu de tout humour, (presque) de tout pathos ; c'est une créature à sang froid : il est objectif et chirurgical. Il ne se réfugie dans aucun asile, pas même celui de la littérature ; la littérature est sa patrie, mais il ne semble tirer d'elle aucune consolation, et certainement pas la moindre glorification. Il vit la littérature ; il en est le digne fils et se veut orphelin de tout ce qui n'est pas elle. Mais l'on n'est jamais assez orphelin pour prétendre au génie, pour devenir un jour silène... Nous ne sommes jamais que des répliques de ces "Hollow Men" dont parle T.S. Eliot. 
Il n'est même pas désespéré : il a certainement dépassé ce stade dès l'enfance. Demeure cette lucidité terrible, à laquelle il manque pourtant un degré pour être tout à fait implacable : "Nous aimons ce qui doit mourir et nous n'aimons que parce que nous nous sentons mortels et menacés." ; "On aime un être que les lendemains menacent et d'autant plus qu'il est menacé, Dieu n'aime pas et n'est pas un objet d'amour, l'amour divin est un non-sens, le mieux est, certes, de n'aimer personne et pour ce nous devons commencer par nous-mêmes. Qui fait profession de se haïr rompt les attachements sensibles."

Mon fantôme, en lisant ces mots, s’assoit sur mes genoux et me dit ces mots.
Ma plus grande peur dans la vie fut de ne pas aimer assez, donc de ne pas aimer. Je ressentais tout l’effroi que ce doute, fétu après fétu, construisait patiemment et habilement en moi, jusqu'à l'étincelle. Mais ce doute était également porteur d’une jouissance terrible : souffrir de ce doute constituait un antidote à la peur elle-même et lui opposait un contre-argument salvateur ; il n’y a que ceux qui sont satisfaits qui sont coupables. Enfant, je me punissais donc lorsque j'estimais que j'avais failli à mon amour absolu pour la gardienne de mes jours : je me pinçais, je me giflais pour obtenir à mes propres yeux  mon absolution ; il fallait que je payasse mes fautes, j'ai toujours été très honnête de ce côté-là. Aimer véritablement, c'était attendre sans répit la mort de l'être aimé – afin de savoir si l’on mourait ou non de chagrin. On survivait toujours. On était factice. Aimer véritablement était une inquiétude permanente qui empêchait de vivre. Il y avait des distractions. On était réel dans ces tristes illusions que l'on faisait marcher. Un tel sentiment impliquait que l'on renonçât définitivement à soi, bien qu'on ne le pût jamais. Aimer, toutefois, apprenait l'humilité puisque l'on n'aimait jamais assez, puisque l’on n’aime jamais, puisque la réalité n'était jamais à la mesure de l'exigence ; c’était le néant qui aspirait à l’incarnation dans un possible ; c’était là toute la puissance du négatif.




"La douleur est partout et le premier devoir consiste à l'éviter, elle est la monnaie de l'amour, l'amour et la douleur marchent sur une ligne, moins nous aimons et moins nous sommes menacés, le propre de l'amour est de dégénérer en tremblement, alors nous apprenons à trembler pour les autres et nous portons la chaîne du souci."
Caraco est, somme toute, plus optimiste que moi. 
Il me semble que l'on ne souffre pas assez d'aimer, que l'on ne tremble pas de tout son être, mais superficiellement, là, dans cet infime interstice, dans ce pli infime où la peau est encore tendre, parce qu'elle n'a pas eu le temps de tout à fait durcir. Mais cela vient, avec le temps. Nous sommes tous des vaches.
Au fond, le mépris, le sublime mépris de tout, exprimé par cet être étrange, pétri de contradictions, qui loue en même temps qu'il improuve cette femme, l'origine de son monde, et, malgré lui, peut-être, son inspiratrice – sa mère –, vacille peu à peu, et ce petit livre n'est que le récit d'une chute dans le sentiment. Le passage d'une fausse indifférence à une douloureuse épiphanie. Un combat de la réflexion contre le soupir. Un arrachement au silence. 
Caraco, comme Barrie avec sa mère, devient le père de sa mère. Il porte sa mère en lui. Ils se sont "hantés l'un l'autre", comme il l'écrit si bien, et il ne la retrouve jamais si bien que dans l'absence que sa mort creuse. Il devient alors sa mère et s'abolit dans sa mort. 
Il la porte


Il est notamment ce passage :






que l'on ne peut que rapprocher de celui-ci, extrait de Margaret Ogilvy :


Je ne lui ai jamais rien lu de ce dernier livre. Quand il fut terminé, elle était trop accablée par le poids des ans pour suivre une histoire. Pour moi, c’était comme si mon livre devait s'en aller, tout seul et nu, de par le monde (ainsi que tous ceux auxquels je donnerai vie désormais) et ma sœur, dont le dévouement n’a trouvé d’égal chez aucun autre être que j'aie jamais connu, comprit cela et, par des moyens qui demeureront mystérieux à tout homme, persuada tendrement ma mère de redevenir un instant la femme qu’elle avait été. Un jour, à peine trois semaines avant sa mort, mon père et moi fûmes doucement appelés là-haut. Ma mère était assise, droite comme un I, dans son vieux fauteuil, près de la fenêtre, là où elle adorait se tenir, un manuscrit dans les mains. Mais elle regardait autour d’elle sans vraiment comprendre. « Simplement pour lui faire plaisir… », chuchota ma sœur et, alors, d’une voix basse et tremblante, ma mère commença à lire. Je regardai ma sœur. Des larmes de chagrin glissaient sur son visage. Bientôt, la lecture ralentit, puis cessa. Après une pause. «Il y avait quelque chose que vous vouliez lui dire… », lui rappela ma sœur. « Chance…», murmura une voix qui semblait d'outre-tombe. « Chance...» Et le vieux sourire vint éclairer son visage, comme si un allumeur de réverbères était passé par là, et elle me dit : « Je suis déjà partie trop loin pour être capable de lire, mais il me semble que je suis encore dans le livre ! » 





Les mères sont toujours dans nos livres, surtout celui que l'on ne peut jamais écrire parce qu'il nous tuerait en la détruisant...


***


Cf. ce site qui lui est entièrement consacré.


Combien différent, sur le même thème, est le Journal de deuil de Roland Barthes. Différent dans l'exposition et l'expression, dans cette chute inversée à celle de Caraco qu'il donne à percevoir, mais si semblable, pour peu que l'on gratte au sang les pages.


De l'un à l'autre, s'entend la même intonation funèbre et coupable. 


Culpabilité du survivant ! 

dimanche 3 octobre 2010

À la fin de sa vie, Barrie écrivait ceci, alors qu'il mettait en fiction les souvenirs de sa jeunesse :

« Jamais est plus triste que Jamais-Plus, parce que celui-ci renferme les douceurs de la mémoire. Jamais-Plus signifie que, vous avez beau être vieux et chenu, il y eut jadis des moments de bonheur sur lesquels vous pouvez vous retourner avec tendresse. Ils sont passés mais ils furent. Nul réconfort de la sorte ne peut être obtenu du Jamais. Le regard furtif de l’amoureux, la main que l’on presse, tous ces moments pendant lesquels on vit toute une existence, il est triste en effet de penser qu’ils n’adviendront plus, mais il est encore plus triste de penser que, jamais, ils n’ont été. Jamais-Plus était une condamnation pour l’avenir ; Jamais une condamnation pour le passé et l’avenir. Le plus triste de tout, c’est que Jamais signifiait que vous étiez conscient d'être passé à côté de tout cela et de devoir continuer à le faire jusqu'à la fin. »
 J.M. Barrie (trad. C.-A. F.)


Il me semble, après toutes ces années passées en sa compagnie, savoir enfin parfaitement ce que tait et dit ce Jamais mélancolique. 


***


samedi 25 septembre 2010


C'est devenu une habitude : je poste toujours une vidéo de présentation lorsque paraît un livre auquel j'ai donné un peu (voire beaucoup) de moi-même... C'est probablement ma façon de lui souhaiter bonne chance tout autant que de lui dire très officiellement adieu. Je ne fais jamais qu'une seule prise (d'où mes maladresses...) et j'improvise sur le vif, sans fards (admirez mes "baggy eyes", les mêmes que ceux de Barrie, à la fin de sa vie – et pour cette seule raison ils me sont chers). Seule m'importe, au fond, l'envie de garder trace de ce présent éternel et paradoxal, de partager un instant avec ceux et celles qui m'accompagnent depuis cinq ans (puisque ce JIACO a vu le jour en septembre 2005 à quelques jours près) et les autres, si précieux, les amis de toujours, d'enfance surtout. Le jour où je ne serai plus capable de me montrer telle que je suis, dans mes limites, mes faiblesses et mon entière vérité du moment présent, je cesserai de parler, d'écrire et de hanter ce petit monde qui est le mien – et le vôtre, pour peu que vous en ayez envie. J'aime l'impudeur tant qu'elle révèle la jointure entre le réel – en l'occurrence mon extériorité, cette persona sur laquelle, à un certain niveau, je n'ai aucun pouvoir – et l'imaginaire – ce sensible que je palpe des paupières, mon intériorité la plus profonde, l'endroit jusqu'où je peux aller sans l'atteindre tout à fait. Je donne à voir mes diverses ombres, mes contradictions, mon impudente joie de vivre, mon pessimisme le plus léché, mais la dernière ombre, celle qui compte plus que toutes les autres, personne ne l'entrevoit, pas même moi. Mais je la devine parfaitement en ayant l'illusion de figer cet impossible présent entre une date et quelques images de ce moi qui n'est déjà plus moi et qui ne l'a peut-être jamais été... 



lundi 20 septembre 2010
"Le pathos de Dickens est larmoyant : il est forcé et délibéré, parce que son intention est précisément de nous faire pleurer aussi fort qu’il nous fait rire. Il introduit des enfants dans ses histoires, des enfants qu’il fera peut-être mourir afin de ralentir le mouvement de l’histoire. On peut également le comparer à ces acteurs qui savent qu’ils meurent bien et qui insistent pour faire tout un acte de cette seule scène. Il nous dit qu’il a versé bien des larmes en écrivant la mort du petit Paul* [de même Barrie prétend avoir pleuré en écrivant Margaret Ogilvy] et il certain que des milliers d’autres par la suite ont pleuré en lisant ce passage, et tout particulièrement s’il est lu à haute voix par un lecteur de talent qui sait à quel moment sa voix doit se briser. Mais ce chapitre est un tire-larmes et il trahit la faiblesse de l’auteur qui s’empresse de s’épancher de cette morbide manière . Nous ne ferions pas grand cas du médecin censé nous soigner qui nous inviterait à entrer dans son cabinet afin de contempler un petit garçon à l’agonie. C’est exactement ce que fait Dickens et il nous prie de voir comment il peut poétiser le plus joliment du monde au chevet du mourant."
(J.M.B. à propos du style de Dickens, trad. C.-A.F.) 


Ne vous fiez pas à cette seule citation, car Dickens est bien l'un des maîtres de Barrie, mais non le seul... et Sir James Matthew l'admirait infiniment. 


En ce qui me concerne, Dickens est le Dieu de mon univers païen, même s'il n'est pas en mesure de rivaliser, dans ma vie, avec Barrie. Toutefois, je fais miens ces mots de Barrie  : "Celui qui n’a pas ri ou pleuré avec Dickens a renoncé à un droit de naissance."

*Dombey {in Dombey and Son}



mardi 14 septembre 2010


Décidément, l'hiver tarde à venir.
Voilà, je suis presque passée de l'autre côté et je sais, enfin.
Il n'y a rien d'autre, de l'autre côté. On est toujours l'autre de son autre moi, mais on n'est jamais, désespérément, que le même. C'est cela le secret de l'ombre de Peter Pan : la conscience qui saisit des reflets, des eidôla, et ne peut se saisir elle-même. Inutile de démultiplier son moi, de le projeter dans mille théâtres d'ombres : la nuit que l'on porte en soi est toujours silence. Il n'y a aucun sens ni suc à tirer d'elle en la perçant du regard. Je suis déjà crevée. Vous aussi. Le sens est toujours extérieur. Il y en moi deux coeurs qui battent et je ne sais plus lequel est le mien. Je ne sais ce que recouvre cet intérieur que je nomme conscience et qui n'est qu'un mot comme un autre, une projection hors de moi – quel que soit ce moi, à l'endroit où je suis crevée. 


Ah, Peter ! Je te dois tant ! Mais me pardonneras-tu, un jour, de t'avoir un peu trahi ou d'avoir donné cette apparence à ceux-qui-ne-savent-pas ? Je n'ai choisi l'autre voie que pour mieux te donner raison, mon garçon, et parce que, toi, tu n'es fait que d'Aiôn et, moi, je ne suis rien d'autre qu'une frêle fille de Chronos. Je ne pouvais plus faire semblant. Je suis déjà vieille, Peter. Je vais bientôt mourir, tandis qu'en chaque enfant qui naît, tu survis ; tu te nourris, vampire, des rires et des jeux de ces innocents qui ne savent pas qu'en oubliant l'heure, tu leur voles un peu de leur vie, chaque jour...


***

Je reviens ici, un trop court moment, pour déposer un faire-part de naissance : le 23 septembre 2010 ce nouvel opus fera son entrée dans le monde.

La quatrième de couverture est de votre servante. J'espère qu'elle ne fera pas fuir les éventuels aventuriers des librairies... Inutile de préciser que la première que j'avais rédigée était trop sombre – morbide ? – et que mon éditeur, très délicatement, m'a incitée (à juste titre, hélas) à bannir les mots "mort" et "larmes", de crainte que le grand public ne soit effrayé et n'ose déposer le livre entre de benjamines mains... Pourtant, la meilleure compagne de jeu des enfants est la Mort. On devient adulte lorsqu'on oublie ce savoir particulier de l'enfance. Barrie jouait sous la table sur laquelle était déposé le cadavre de son frère. Les enfants jouent avec nos souvenirs, avec notre passé, comme avec des osselets. Ils auraient tort de s'en priver. Après tout, on ne les fait que pour leur accorder le privilège de nous enterrer. 


Peter, lui, enterre tout le monde. Et, même si je lui ai toujours préféré Hook, Peter demeurera toujours pour moi le seul spectateur honnête de mon existence. 








Peter Pan dans les Jardins de Kensington a été publié, pour la première fois, en 1906, en Angleterre; en 1907, Hachette le publia en France sous le titre fort étonnant de Piter Pan dans les Jardins de Kensington. Il existe deux versions anglaises (et non américaines, il faut le souligner) de référence de Peter Pan dans les Jardins de Kensington. La première, en date de 1906 (et ses rééditions), comporte 50 planches de Rackham. La seconde (publiée en 1912) et ses rééditions comportent ces mêmes 50 planches, avec une nouvelle illustration (le magnifique frontispice ci-contre) ainsi que des illustrations en noir et blanc qui n'existaient pas dans la première version et ses rééditions. Il me semble important de le préciser, d'autant plus que seule l'édition de 1912 dispose les illustrations dans l'ordre et au regard du texte. C'est à partir de cette version (j'ai la chance de la posséder) que  j'ai bien évidemment travaillé.

Plus tard, en France, furent publiées des éditions destinées aux enfants, des juvenilia. 
Un exemple, parmi d'autres, que je n'ai acquis que par curiosité :




C'est proprement abominable. La personne qui a adapté le texte a fait preuve d'une niaiserie insupportable qui donne des envies de meurtres. 
Plus proche de nous, il exista une édition de ce conte, publié par les Éditions Corentin, en petit format, mais la traduction était fautive en de nombreux endroits et ne comportait pas toutes les illustrations de Rackham ni ne leur rendait justice. 
Peter Pan dans les Jardins de Kensington est le conte tiré du Petit Oiseau blanc. Mais Barrie avait légèrement amendé les pages qui décrivaient la naissance de Peter Pan, le premier Peter, l'âme du second – plus célèbre que son double. J'ai écrit une nouvelle traduction de ces chapitres, en respectant les modifications de Barrie et en améliorant le travail de la novice que j'étais à l'époque (et je que je suis moins, on peut l'espérer). 
J'ai déployé tous les efforts possibles afin que mon éditeur – en la circonstance, Terre de Brume – soit vigilant aux coquilles (le "péché mignon" de cette maison d'édition qui a, cependant, le grand mérite de publier des textes rares ou inédits en français, mais peu de moyens) cette fois-ci. À cet égard, je remercie chaleureusement mon ami Jean-Christophe Boutin, pour son amitié indéfectible et pour sa relecture. Je n'ai pas encore le livre en mains, je ne peux donc préjuger du résultat final. 

La préface ("Le Péan de Pan") que j'ai signée et dont je livre  ci-dessous un extrait est, elle aussi, inédite. 



"Peter Pan n’existe pas !

Il faut, enfin, révéler cette vérité.
Mais qu’est donc Peter Pan ? Il n’est rien d’autre que l’ombre de nous-mêmes.
Peter Pan n’est même pas éternel ; il n’est qu’immortel ; car toute la différence qui existe entre l’éternité et l’immortalité, c’est que la première ne possède ni début ni fin et le temps ne la soucie donc guère ; l’éternel est en dehors du temps, tandis que celui qui est doté d’immortalité est, un jour, né, et demeure à jamais dans l’entre-deux du temps et du néant atemporel. La position est intenable ! À moins de concevoir le Temps dédoublé en deux temps, chronos et aiôn… Et naître est bien la malédiction, si l’on en croit la sagesse tragique du Silène (1). L’humain, lui, est éphémère : il naît et meurt. Dans cette limite résident à la fois tout don et toute malédiction. Peter Pan, lui, ne cesse pas de ne pas naître, en appelle à une mort qui, jamais, ne viendra le délivrer : il subit la malédiction sans bénéficier de son versant positif. Peter Pan désire la mort (« Mourir sera une prodigieuse aventure ! »), parce qu’il aspire à la vie, à ce qui ferait de lui un « véritable petit garçon », fait de chair, de temps (chronos) et de sang. En cela, il présente bien des points communs avec un autre personnage de la littérature : le Pinocchio de Collodi. Mais, pour mourir et pour vivre, il faut naître.
(…)
L’ombre des grands poètes (romantiques ou non) danse, telle une flamme mourante, dans ce livre que vous tenez entre les mains et que, peut-être, innocente âme, vous déposerez dans la chambre de votre enfant. De Wordsworth, Shelley, Lamb et de quelques autres Barrie tira une étincelle pour donner naissance à Peter, qui est de la race de Pan et de Dionysos. Et même si, bien avant Barrie, les fées peuplaient déjà les Jardins de Kensington – en témoigne le poème de Thomas Tickell, Kensington Gardens, publié en 1722 –, c’est lui qui rendra immortels certains lieux. Rien ne prouve que Barrie ait lu Tickell ; en revanche, il est certain qu’il ne pouvait pas ne pas connaître William Wordsworth et sa fabuleuse ode, Intimations of Immortality from Recollections of Early Childhood (Présages de notre immortalité tirés des souvenirs de notre prime enfance), tant l’esprit de Peter Pan et celui de l’ode sont à l’unisson. Citons, en particulier, ces mots : « À présent, je ne puis plus revoir les choses que j’ai vues » ; « Notre naissance n’est que sommeil et oubli (…) Les cieux nous environnent à notre heure première » ; « Les ombres de la prison commencent à se refermer sur l’enfant qui grandit (…) » (2) Pour le poète, il existe un état de grâce lié à cette existence qui précède la naissance et qui laisse une trace en nous, cause à la fois de notre désespoir – nous l’avons perdu – et de notre espérance – nous avons fugitivement entrevu notre autre nature, sublime et céleste…
(…)"
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(1) Elle s'exprime dans ces mots du Silène au roi Midas: « Race éphémère et misérable, enfant du hasard et de la peine, pourquoi me forces-tu à te révéler ce qu'il vaudrait mieux pour toi ne pas entendre ? Ce que tu dois préférer à tout, c'est pour toi hors d'atteinte : c'est de ne pas être né, de ne pas être, d'être néant. » (Nietzsche in Naissance de la tragédie, paragraphe 3, in Œuvres, trad. de Henri Albert, Paris, Robert Laffont, 1993).
(2) Toutes les citations ont été traduites par l’auteur de la préface, sauf mention contraire.


Il me semble que ce livre constituerait un joli présent pour les fêtes de Noël. C'est dans cet esprit, en tout cas, qu'il fut publié par Barrie. Quant à moi, petite ventriloque, je l'ai conçu d'abord comme un livre destiné aux adultes, mais un livre auquel les enfants pourraient goûter. En cela, je respecte l'enfance dans l'enfant. Selon moi, adapter et édulcorer sont des préceptes barbares et une insulte que l'on fait aux petites personnes. 
Plus personnellement - mais est-il quelque chose dans mon travail qui ne le soit pas infiniment ? -, ce livre inaugure un nouveau chapitre de mon existence – chapitre dont le titre sera révélé par la dédicace que j'ai apposée dans cet ouvrage... Barrie est le parrain de ce futur et, sans lui, il est vraisemblable que nous n'aurions pas tenté cette prodigieuse aventure ! Mais cela ne change point mon avis sur les mères, vous savez... Même si je ne suis pas à une contradiction près. Quoi qu'il en soit, j'espère bien être une mère indigne, car je hais plus que jamais les mères – celles, par exemple, qui donnent l'espoir que l'enfance n'est qu'un début quand elle n'est déjà que la mort consommée. Être adulte n'est que l'extrapolation de l'enfance que l'on a été capable d'avoir, avec sur le dos le fardeau de la peur et des échecs. Bien sûr, je songe à Romain Gary, sublime héros de mon univers. 

"Avec l'amour maternel, la vie vous fait à l'aube une promesse qu'elle ne tient jamais. On est obligé ensuite de manger froid jusqu'à la fin de ses jours. Après cela, chaque fois qu'une femme vous prend dans ses bras et vous serre sur son cœur, ce ne sont que des condoléances. On revient toujours gueuler sur la tombe de sa mère comme un chien abandonné. Jamais plus, jamais plus, jamais plus. Des bras adorables se referment autour de votre cou et des lèvres très douces vous parlent d'amour, mais vous êtes au courant. Vous êtes passé à la source très tôt et vous avez tout bu. Lorsque la soif vous reprend, vous avez beau vous jeter de tous côtés, il n'y a plus de puits, il n'y a que des mirages. Vous avez fait, dès la première lueur de l'aube, une étude très serrée de l'amour et vous avez sur vous de la documentation. Je ne dis pas qu'il faille empêcher les mères d'aimer leurs petits. Je dis simplement qu'il vaut mieux que les mères aient encore quelqu'un d'autre à aimer. Si ma mère avait eu un amant, je n'aurais pas passé ma vie à mourir de soif auprès de chaque fontaine. Malheureusement pour moi, je me connais en vrais diamants."

Par chance, la mienne, qui n'était qu'une matrice cassée, était une ordure et l'esclave de ses pauvres démons  ; elle m'aura rendu un service inestimable dont je ne saurais jamais la remercier assez – et je le dis sans ironie aucune, sans amertume non plus. Il n'est plus temps pour cela. Il  était déjà bien trop tard quand il eût été temps de la haïr et de lui en vouloir : à peine m'étais-je rendu compte que j'étais différente –  tous les autres de ma connaissance avaient une mère, la mienne m'avait abandonnée à la naissance –  que j'avais appris à m'en passer. J'aurais préféré avoir un père, car j'ignorais vraiment à quoi il aurait pu servir. Peut-être est-ce la raison pour laquelle j'ai beaucoup d'indulgence et de tendresse pour les pères, parce qu'il m'en a longtemps manqué un, jusque dans mon imaginaire. 


Ce qui est certain, c'est que Peter et moi sommes faits de la même ombre et que nous avons tété les mêmes fantômes. Il est également incontestable qu'une même artère irrigue le coeur de Barrie, de Gary, de Léautaud, de Céline et de quelques autres de mes pères. Oui, je conjugue toujours le mot père au pluriel, quand je peinerais à accorder la moindre singularité ou le plus infime poids à la mère. 



De digression en digression, je me révèle bien davantage qu'il n'y paraît et j'aime me mettre en danger et à nu. Précisément, parce que sans danger la vie ne vaut rien et, moins courageusement, parce qu'il y a toujours une ombre, cet autre moi, pour me vêtir un peu  ; et personne ne peut voir à travers – pas même moi. Non que je m'y refuse, pourtant. Mais si je savais, le ressort serait brisé. 

En écrivant ces quelques lignes, je songe à la perception que nos écrivains français (du temps où il en existait encore, car je hais et méprise à peu près près tous ceux qui écrivent aujourd'hui dans notre langue) avaient de Barrie. Je sais que Larbaud le connaissait (il le cite dans son Journal), mais je songe à Paul Morand qui évoque – fort mal, cela va sans dire, et cela me déçoit beaucoup tant je prise le style de cet écrivain  – la figure de Barrie dans ce livre:





Morand affirme qu'à son époque Barrie était davantage connu en France que dans son propre pays (je crois que Morand se trompe) ; peut-être était-il bien connu en France, jadis, mais sa renommée s'estompa en un éclair, faute de traductions de ses oeuvres et, par conséquent, par une méconnaissance de l'oeuvre. Méconnaissance à laquelle n'échappe pas Morand lorsqu'il affirme que "Barrie (...) se refusa à grandir, et voulut rester un enfant" ou bien lorsqu'il évoque l'amour (si c'est là l'amour d'un fils, j'espère que cet autre enfant, celui qui est en chemin pour me rendre visite, me détestera) qu'il concevait pour sa mère ou d'autres inexactitudes...


En cela, Morand, comme d'autres avant et après lui, s'est laissé piéger par ce que j'appelle le "truc" de Barrie, à savoir ce tour de main particulier qui consiste à tromper le lecteur et à ne lui laisser percevoir qu'un de ses "moi", le plus fictif, bien évidemment...

***
Billet écrit en écoutant les Préludes de Debussy - qui fut inspiré par Barrie et Rackham, ainsi que je vous le révélai ici

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Dilettante. Pirate à seize heures, bien que n'ayant pas le pied marin. En devenir de qui j'ose être. Docteur en philosophie de la Sorbonne. Amie de James Matthew Barrie et de Cary Grant. Traducteur littéraire. Parfois dramaturge et biographe. Créature qui écrit sans cesse. Je suis ce que j'écris. Je ne serai jamais moins que ce que mes rêves osent dire.
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