samedi 17 juin 2006
[J'ai été un peu absente ces derniers jours, car je travaille intensément sur Barrie, le forum est ouvert, mais je vais m'efforcer de me reprendre en main...]
L'avant-dernier film de Steve McQueen, réalisé par William Wiard, laisse un goût amer. Je ne sais si cela est une simple impression personnelle, mais Steve McQueen paraît si vieilli que cela fent le coeur. Difficile de dire si la maladie qui l'a emporté faisait déjà rage en lui ou si son personnage exigeait cette lassitude qui transparaît dans chacun de ses mouvements et de ses expressions. La vie est pesante, il la traîne derrière lui, de même sa légende. Pourtant, il n'a rien de la fougue des cowboys victorieux et fanfarons, tels ceux incarnés par un Clint Eastwood aussi prompt à exploser qu'un bâton de dynamite.
Le récit est inspiré d'une histoire réelle. Ce héros de l'Ouest sauvage, qui a existé, était un tueur (même s'il agit selon des circonstances qui respectent le droit de l'époque : il protège des troupeaux, il a combattu les indiens, etc.) mais, étrangement, dans ce personnage cohabite un calme, une innocence et une sérénité qui font de lui l'antithèse du cowboy, héros traditionnel des westerns. Le personnage est absent de sa propre existence, il est un corps qui se meut. Sa passion avec la jolie institutrice (Linda Evans) donne un sentiment d'irréalité. Electro-encéphalogramme plat pour cette amourette qui tourne court.
N'est-elle qu'un rêve avec lequel il joue dans la solitude de sa cellule, le regard fixé sur des montagnes qui reculent à chaque heure, à mesure qu'il lâche prise, ou bien revit-il des moments passés ? La réalisation laisse presque un doute sur la réponse. De même en ce qui concerne le meurtre dont il est accusé. Il nous est présenté comme innocent mais le contraire demeure présent à titre de possible, dans le non-dit, le silence... L'histoire nous dit que Tom Horn était innocent mais rien ne l'a prouvé, ni le contraire. Mais peut-on prouver une chose négative ? Bien sûr que non !
Tom est, en effet, accusé du meurtre d'un jeune garçon. On veut sa peau. Il ne se défend pas, estimant n'avoir pas à le faire, puisque son innocence est évidente à ses yeux. Il semble qu'il attende la fin, se débattant à peine : sa fuite semble si vaine ! Il est rejoint par l'absurdité de son existence, qui fut errance sans but.
Il pourrait être un personnage de Camus.
L'extrait que j'ai choisi correspond à la fin du long métrage. Peut-être le meilleur moment du film. Je me remémore l'essai de Camus sur la peine de mort, Réflexions sur la peine capitale. Je suggère que ceux qui sont "pour" la donnent eux-mêmes. Cela me paraît justice. Il n'existe pas d'assassin par procuration. Nous le sommes tous dès que nous nous taisons ou baissons les yeux. Cette lâcheté est dite dans le film puisque personne n'accepte d'ouvrir la trappe sous Tom Horn, car personne ne veut lui infliger cette peine. Hypocritement, on construit une machine, un mécanisme qui ouvrira cette trappe sous la pression de l'eau. Personne est-il un monstre anonyme ? Non, personne, c'est chacun d'entre eux, chacun d'entre nous.
[Pardon pour le son ; j'ai rencontré un problème à l'encodage.]
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