jeudi 21 décembre 2006
On a rendu dernièrement bel et vibrant hommage aux images, aux surréalistes et à leurs frères d'âme, ces illusionnistes qui, seuls, par le plus impensables des paradoxes, parviennent peut-être à sortir de la Caverne de Platon... Mais à quel prix cette inflammation des sens ? A quoi faut-il renoncer pour voir et, plus encore, donner à voir ?
Cette implosion de l'esprit, Artaud l'a connue, mais jusqu'à la damnation éternelle de sa raison.
Nul doute qu'il en avait déjà fini avec le jugement de Dieu
avant même de se croire l'auteur de certains écrits de Lewis Carroll... Quelque chose en lui était fracturé dès la naissance.
Je ne sais s'il est souhaitable de souffrir autant que lui pour atteindre le sublime, mais je suis bien persuadée que l'immense artiste qu'il fut, à l'instar d'un Mervyn Peake, mais acteur en prime, a payé ce privilège dans sa chair autant que dans sa pensée.
Qui peut douter en regardant Artaud, dans le magistral film de Dreyer, La passion de Jeanne d'Arc, que son regard
porte au-delà des apparences communes aux pauvres mortels que nous sommes ?
Artaud est un oiseau de mauvais augure, il croasse, mais dans sa folie, ultime refuge probablement d'une impitoyable lucidité, il avait saisi l'essence de l'art.
Il n'est pas temps encore pour moi de vous parler de lui, mais j'aimerais déposer ses mots ici, en guise de préambule à d'autres billets et de commentaire au billet du jour de Gaëlle.
L'opposition de l'image au concept a traversé toute la littérature et la philosophie, en France plus qu'ailleurs en ce qui concerne la fiction. Comment pourrait-il en être autrement ? L'image est ce qui n'est pas maîtrisable, ce qui échappe à toute tentative de rationalisation. C'est le mystère incarné, le Verbe premier.
L'image crée sa vérité, qui n'est pas celle de la raison. L'entendement dévoie vers le vivable quand l'image nous coupe en deux, pour voir si nous portons un fruit, si nous avons autant de valeur qu'une noix. Elle est la clef qui ouvre un autre monde, plus réel que celui dans lequel nous avons coutume de vivre et de penser. C'est le monde intérieur, celui de l'homme barbare et cruel. D'une de ses côtes naît l'artiste. Toute folie n'est pas artiste mais tout artiste pactise avec une forme de folie. Il porte en pendentif cette goutte de déraison solidifiée. C'est un danger, une angoisse, mais ce n'est jamais un choix. On peut penser fuir ailleurs. Sauf qu'il n'existe aucun ailleurs.
"Ce qui est du domaine de l'image est irréductible par la raison et doit demeurer dans l'image sous peine de s'annihiler.
Mais toutefois il y a une raison dans les images, il y a des images plus claires dans le monde de la vitalité imagée.
Il y a dans le grouillement immédiat de l'esprit une insertion mutiforme et brillante de bêtes. Ce poudroiement insensible et pensant s'ordonne suivant des lois qu'il tire de l'intérieur de lui-même, en marge de la raison claire et de la conscience ou raison traversée.
Dans le domaine surélevé des images l'illusion proprement dite, l'erreur matérielle, n'existe pas, à plus forte raison l'illusion de la connaissance ; mais à plus forte raison encore le sens d'une nouvelle connaissance peut et doit descendre dans la réalité de la vie.
La réalité de la vie est dans l'impulsivité de la matière. L'esprit de l'homme est malade au milieu de concepts. Ne lui demandez pas de se satisfaire, demandez-lui seulement d'être calme, de croire qu'il a bien trouvé sa place. Mais seul le Fou est bien calme."
Artaud, comme Socrate, est la figure par excellence du Silène.
Le sang d'un poète, film onirique de Jean Cocteau, grand manipulateur d'images, exprime tout ceci. J'en extrais une image particulière, qui m'a toujours donné un point de côté.
Je suis cette enfant sur le rebord.
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Libellés :Antonin Artaud,folie,image,littérature française,raison
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