dimanche 31 décembre 2006
Avec ou sans disque dur, ma mémoire est encore vaillante et mes forces intactes, puisque j'ai envie ce matin, contre toute attente, d'écrire quelques lignes pour refermer cette année, qui m'a offert de belles rencontres livresques et humaines. D'autres relations se sont épanouies et je suis toujours étonnée par l'amitié, qui vous rend décidément beaucoup plus fort et peut-être même plus beau. Je n'ai pas spécialement de bonnes résolutions pour l'avenir, sinon de donner plus de puissance à mon travail, de mieux me concentrer et d'oser davantage l'écriture qui me tiraille. Demeurer dilettante, car les spécialistes sont souvent stériles lorsqu'il atteignent certain niveau de complexité, mais laisser se sédimenter mes aspirations les plus violentes et construire sur ce socle mon existence. Le reste, je le laisse à Maître Hasard.

2007 sera, selon toute vraisemblance, une année écossaise pour moi. Je le souhaite. Si le vieux barbu me prête vie, je serai en Ecosse au printemps, pour visiter Barrie, Walter Scott, Stevenson et quelques autres, dans le but d'écrire quelques pages qui seront des pages écossaises, en témoignage d'amour et de respect pour James Matthew Barrie. J'espère avoir le temps, pendant ce voyage en langue anglaise, de me rendre à Haworth, dans le West Yorkshire, en mémoire de mes amies, les soeurs Brontë

[The Brontë Sisters, peinture de Patrick Branwell Brontë, vers 1834. De gauche à droite : Anne, Emily, and Charlotte ; Branwell s'était représenté au départ entre Emily et Charlotte mais il a effacé sa présence par la suite... Très étrange l'impression suscitée par cet espace vide... ]


(sans oublier Branwell). Je m'identifie beaucoup à Emily, [Emily peinte par son frère]

qui demeure ma préférée, car Wuthering Heights et ses poèmes sont d'une telle incandescence que j'aime à m'y brûler, mais Charlotte a conquis mon affection la première, dans l'enfance.

A DAY DREAM (par Emily Brontë)

ON a sunny brae alone I lay
One summer afternoon;
It was the marriage-time of May,
With her young lover, June.

From her mother's heart seemed loath to part
That queen of bridal charms,
But her father smiled on the fairest child
He ever held in his arms.

The trees did wave their plumy crests,
The glad birds carolled clear;
And I, of all the wedding guests,
Was only sullen there!

There was not one, but wished to shun
My aspect void of cheer;
The very gray rocks, looking on,
Asked, "What do you here?"

And I could utter no reply;
In sooth, I did not know
Why I had brought a clouded eye
To greet the general glow.

So, resting on a heathy bank,
I took my heart to me;
And we together sadly sank
Into a reverie.

We thought,
"When winter comes again,
Where will these bright things be?
All vanished, like a vision vain,
An unreal mockery!

"The birds that now so blithely sing,
Through deserts, frozen dry,
Poor spectres of the perished spring,
In famished troops will fly.

"And why should we be glad at all?
The leaf is hardly green,
Before a token of its fallIs on the surface seen!"

Now, whether it were really so,
I never could be sure;
But as in fit of peevish woe,
I stretched me on the moor,

A thousand thousand gleaming fires
Seemed kindling in the air;
A thousand thousand silvery lyres
Resounded far and near:

Methought, the very breath I breathed
Was full of sparks divine,
And all my heather-couch was wreathed
By that celestial shine!

And, while the wide earth echoing rung
To that strange minstrelsy
The little glittering spirits sung,
Or seemed to sing, to me:

"O mortal! mortal! let them die;
Let time and tears destroy,
That we may overflow the sky
With universal joy!
"Let grief distract the sufferer's breast,
And night obscure his way;
They hasten him to endless rest,
And everlasting day.

"To thee the world is like a tomb,
A desert's naked shore;
To us, in unimagined bloom,
It brightens more and more!

"And, could we lift the veil, and give
One brief glimpse to thine eye,
Thou wouldst rejoice for those that live,
BECAUSE they live to die."
The music ceased; the noonday dream,
Like dream of night, withdrew;
But Fancy, still, will sometimes deem
Her fond creation true.

Je retournerai à Londres le temps de revoir les lieux barriens que je connais déjà pour certains. Bien sûr, je rendrai compte de ce voyage, ici même, si mes lecteurs sont toujours présents.

*

Walter Scott (1771-1832) m'est davantage familier, au fur et à mesure que je travaille à mon étude qui devrait accompagner les textes de Barrie que je traduis. Je ne savais pas dans quel engrenage je mettais le doigt en m'attelant à ce gros volume barrien. Pénétrer dans le monde des légendes celtiques, afin de mieux saisir et de mettre en perspective les sources de James Matthew Barrie, est à la fois un enchantement et un motif d'inquiétude constante : une part de mon esprit n'est-elle pas désormais captive de l'autre monde ? Et si ces divers livres étaient un appât pour piéger mon âme et mon esprit ? Serai-je comme ces pauvres hères prisonniers d'un cercle de fées et qui sont obligés de danser jusqu'à l'épuisement et la mort ? Ou bien peut-être ne suis-je pas humaine mais une enfant née sur les îles de Tir Nan'Og et qui vit en marge des hommes, sur la frange de leurs rêves éveillés ? Qui sait ce que nous sommes réellement ? Berkeley ou Shakespeare et bien d'autres ont posé cette question, chacun à leur manière.
J'ai déjà une bibliographie longue comme le bras gauche et mon esprit ne sait où tourner ses vacillantes lumières. Mais quel bonheur ! Je ne vis jamais aussi intensément que dans l'étude et lorsque mes doigts s'agitent sur le clavier (et lorsque l'ordinateur ronronne au lieu de flamber, aussi excité que je le suis dans la découverte). Je me sens également légitimée dans ma propre tentative romanesque, comme si j'avais trouvé ma véritable famille littéraire et acceptait enfin cette ascendance.
En 1830, après une première attaque de paralysie, pendant sa convalescence, Scott écrivit les Letters on Demonology and Witchcraft ;





il y fut incité par son beau-fils. L'ouvrage se compose de dix longues lettres à lui adressées. Bien sûr, Scott est un enfant des Lumières et il fait oeuvre de rapporteur de légendes et d'opinions, de conteur ; il critique également les procès de sorcellerie qui ne laissaient aucune chance aux accusés.
Il suffit de lire l'effroyable Malleus maleficarum (Le marteau des sorcières) de Henry Institoris et Jacques Sprenger (1486), pour avoir la chair de poule.
Comme toujours, chez Walter Scott, le propos est précis et copieux, d'un sérieux mâtiné de quelque souffle épique.

Je joins plus loin des extraits de la lettre IV (traduction d'Albert Montémont) où il est question de changelins et de Thomas le Rimeur... Ce dernier est le personnage d'une fameuse ballade des Borders (la région d'Ecosse, où beaucoup de sang fut versé par les écossais et les anglais, car elle servait de tampon entre les deux pays). A lire :

Pour faire plus ample connaissance avec les chansons des Borders vous pouvez visiter cette page bilingue. Cette chanson-ci est citée par J.M. Barrie, qui fait beaucoup référence aux Borders, à l'histoire et à la mythologie écossaise dans Adieu Mademoiselle Julie Logan, son conte de noël et / ou d'hiver qui met en scène un fantôme qui pourrait être l'ancêtre de la bien vivante Mary A., connue de ceux qui ont lu Le petit Oiseau blanc. Les ballades sont souvent teintées de surnaturel et sont la source de contes plus étoffés. Barrie s'ingénie à reprendre dans cette histoire un certain nombres d'éléments du folklore écossais - la pierre de Logan, par exemple... il existe plusieurs pierres de cette sorte... - et de l'histoire terrible des luttes entre anglais protestants et écossais jacobites (catholiques) partisans des Stuarts, dont "Bonnie Prince Charlie" (le Prince Charles-Edouard)

est la figure de proue dans le conte de Barrie. Le jacobitisme dont il est question, par allusions chez Barrie, est très connu aussi des lecteurs de Walter Scott ou de Stevenson (Cf. Kidnapped). Il n'est pas non plus innocent de songer que l'autre prénom du Capitaine Crochet (Hook) est Jacobus... Mais c'est une autre histoire que je raconterai ailleurs. Qui m'aime me suive...


*


(...)











[Cliquez sur les petits extraits pour les agrandir.]

******************
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