lundi 5 février 2007
Alors que je traduis A kiss for Cinderella,


une très belle pièce de Barrie (ce personnage est capital dans son oeuvre), et que je tente vaille que vaille d'écrire quelque chose qui pourrait ressembler à un roman, avec l'idée serrée entre deux angoisses existentielles d'oser finir un petit truc, songeant qu'à mon âge il est temps et plus que temps... Je prends quelques vitamines littéraires ou cinématographiques pour me donner le teint frais. Si cela ne repose pas mes yeux, qui sont en très mauvaise santé en ce moment, cela apaise un peu la douleur d'écrire des foutaises avec un style à qui pas un lecteur ne ferait la mendicité, moi la première. Je crois que je suis bien trop lucide et exigeante envers les livres pour jamais prétendre faire mieux qu'essayer d'en donner un au monde. Je ne compte plus les rebuts dans mon ordinateur et dans ma poubelle. Je n'ai jamais compris tous ces médiocres qui publient sans avoir honte d'eux-mêmes. Je comprends encore moins leurs lecteurs. Je préférerais toujours Sophocle, Homère, Dickens, Céline... à ces putes des lettres ; je ne parle même pas de leurs maquereaux d'éditeurs qui sont encore mille fois plus coupables. Il n'ont même l'excuse de l'innocence, c'est bien là leur plus grande faute.


Je me gâte et l'un de ces plaisirs est celui de retrouver, chaque jour, deux vieux amis.

Je vous offre cette petite sucrerie avant de revenir bientôt poster un billet un peu plus conséquent et peut-être même un peu plus sérieux.

Nul besoin de vous les présenter, je crois que la plupart d'entre vous les connaissent.
Sinon, la voix d'Al Jarreau devrait vous rafraîchir un peu la mémoire.

Some walk by night,
Some fly by day,
Nothing could change you,
Set and sure of the way.
There is the sun and moon,
They sing their own sweet tune,
Watch them when dawn is due,
Sharing one space.
We'll walk by night,
We'll fly by day,
Moonlighting strangers
Who just met on the way.

Dans les années 80, j'étais une (très) petite fille et je ne regardais pas la télévision. Ce n'était pas tellement le genre de la maison. J'avais très peu de permissions pour les divertissements. Ce n'était pas un mal en soi. J'ai ainsi pu profiter de mon enfance en mourant d'ennui chaque jour et cet ennui m'a conduite à inventer mes premières histoires et à écrire mes premières bêtises (mais je ne devins pas Jacques Laurent pour autant).

Ce n'est que que très récemment que j'ai découvert la série Clair de lune, qui fit, jadis, les beaux jours de la télévision française (et mondiale). C'est une chance, somme toute, car à l'époque je n'aurais pas été capable de goûter les subtils clins d'oeil au cinéma, à la télévision ou à la littérature que cette série ne cesse de provoquer. Dans un épisode, vous pouvez savourer une parodie du Crime de l'Orient-Express mêlée à certaines scènes ou propos décalqués d'Un cadavre au dessert ; dans un autre, la scène du miroir de Duck soup fait bon ménage avec la plus farfelue des enquêtes... J'avais dit un mot sur le sujet il y a quelques mois. Je n'en étais qu'au début de ma relation avec cette oeuvre loufoque, qui traitait le téléspectateur avec beaucoup de galanterie, faisant tout autant appel à son intelligence qu'à sa mémoire.
Les maîtres mots de cette création télévisuelle étaient non-sens et deuxième (ou troisième) degré. Cette série avait la classe et la répartie de certaines screwball comedies, celles de Howard Hawks, par exemple, qui demeurent une référence en matière d'esthétique du comique, de vivacité dans les dialogues et dans les situations, et d'intelligence dans l'auto et l'extra-référentiel. Brillant est le mot qui convient pour dire l'indicible.

La Dame du Vendredi 


est le modèle le plus évident pour décrire à la fois les rapports entre les deux protagonistes principaux (l'homme qui titille et la femme qui s'énerve jusqu'à l'hystérie collective) et le principe nerveux qui soutient l'ensemble. Souvenez-vous de cette scène, lorsque le personnage incarné par Cary Grant fait référence à un certain Archie Leach (qui n'est autre que lui-même, puisque Cary Grant est un pseudonyme) ou encore ce moment où il évoque "the Mock Turtle" et qu'il fait alors écho au film où il jouait ce personnage de Lewis Carroll... 

On pourrait tout aussi bien citer certains films de Billy Wilder, de Leo McCarey, de Capra ou de Preston Sturges, qui sont le vivier où puise cette série, sans compter mille autres choses, qui sont toutes assumées par les scénaristes et les réalisateurs.
Ce qui me plaît le plus, ce sont peut-être les références les plus fines que, somme toute, assez peu de gens peuvent saisir, surtout s'ils n'ont aucune connaissance en matière de cinéma (mais pas seulement, car que serait un cinéphile qui ne goûterait à aucun autre aspect de la culture ?).
Aujourd'hui, je puis dire que je suis confondue par tant de métalepses et de mises en abyme et même de profondeur, oserai-je dire, de la part d'une oeuvre dont le premier but était un innocent divertissement.
Aucune autre série télévisée n'a peut-être créé une complicité aussi exacerbée entre les personnages et leurs admirateurs (nous). Les acteurs s'adressent à nous et nous demandent notre avis. On a l'impression, parfois, qu'ils viennent cogner contre la vitre du téléviseur.

Force est de constater que Moonlighting fit date et inspira ses suivantes, au moins quelques-unes.

Cette époque est plus ou moins révolue et hormis des productions télévisuelles de haut vol (Six feet under, The Sopranos, Angels in America, Carnivale...) et quelques O.V.N.I. (Dead like me), nous sommes entrés dans l'ère de la vulgarité et de l'insipide. Je n'allume jamais ma télévision sans m'être assurée que je ne risquais rien et, exceptés quelques moments de grâce passés en compagnie de Morse ou de Frost, je préfère m'abstenir...
C'est un scénariste de la série Remington Steele, Glenn Gordon Caron, qui eut l'idée de cette fausse série policière. En effet, les enquêtes policières ne sont qu'un prétexte, parfois on démonte même le décor avant de terminer l'histoire... Le véritable sujet est la relation entre les deux protagonistes, David et Maddie, que tout oppose, qui ne cessent de se crêper le chignon, de s'insulter et de se séduire sans oser se l'avouer. Je me souviens d'un coup de poing dans l'oeil gracieusement envoyé par la dame au monsieur...
Dans cette scène-ci que je vous présente en images, Maddie croit s'adresser à l'homme qui l'a demandée en mariage (Sam) et elle lui explique qu'elle ne peut accepter car elle aime aussi un autre homme (David). Bien sûr, elle n'est pas encore capable de se dire qu'elle n'aime que ce dernier. Elle veut leur offrir une nuit d'adieux. Or, il se trouve que c'est David et non Sam qui est dans le lit... Situation on ne peut plus classique de quiproquo mais quel fantastique affrontement !





Leur histoire durera un peu moins de cinq ans. Ce qui devait arriver arriva mais... vous le savez mieux que moi.

Qui pourrait encore se vanter d'avoir une standardiste


qui parle en vers plutôt qu'en prose ?

"Blue Moon Detective Agency. If persons are missing, if objects are lost, we'll find then for you at a reasonable cost. Your runaway husband that non-paying louse. We'll find and bring him back to the house. Lost a prize winning dog? Lost a prize winning cat? We'll find them both for you in just no time flat. So tell us your problem, it'll all work out fine. Just tell me your problem, it's why I'm on the line. "

est le modèle le plus évident pour décrire à la fois les rapports entre les deux protagonistes principaux (l'homme qui titille et la femme qui s'énerve jusqu'à l'hystérie collective) et le principe nerveux qui soutient l'ensemble. Souvenez-vous de cette scène, lorsque le personnage incarné par Cary Grant fait référence à un certain Archie Leach (qui n'est autre que lui-même, puisque Cary Grant est un pseudonyme) ou encore ce moment où il évoque

"Blue Moon Detective Agency. We're detectives with a heart, we really do our part. In your moment of need, we'll be there indeed. So please don't be shy, just give us a try. We're co-operative and discreet, we really can't be beat. And if I may be so bold, I'd like to put you on hold."

Allyce Beasley, qui donne vie au personnage d'Agnes DiPesto, est une actrice remarquable. Les yeux écarquillés et le visage tendre, c'est peut-être elle la véritable héroïne... Tous ces gens, trop discrets, dont la présence semble ne point compter et qui font pourtant la différence dans la vie des autres. Il en existe certainement un dans votre propre existence. Regardez bien.
Le personnage sera chouchouté pendant quelques épisodes (North by North DiPesto, par exemple, sur le modèle de La mort aux trousses d'Alfred Hitchcock ! ) qui seront centrés sur son personnage. Sa présence est indispensable, car elle apporte une touche de générosité et de naïveté au sein de toute cette agitation. J'aimerais beaucoup rencontrer une telle personne dans la vie réelle...


Qui pourrait encore se vanter d'obtenir la présence d'Orson Welles (mon admiration pour lui est sans bornes)

pour présenter un épisode réalisé en noir et blanc, une variation sur le film de Tay Garnett, Le facteur sonne toujours deux fois et un hommage aux film de la MGM et de la Warner ? 


Le grand Orson mourra quelques jours après avoir enregistré sa participation à Clair de lune.
Qui pourrait nous refaire le coup de La mégère apprivoisée et nous entraîner au pays de Shakespeare ?


Les scripts étaient deux fois plus longs que les autres séries contemporaines et la série coûtait beaucoup plus chère que toutes les séries qui étaient à l'écran à l'époque et qui épuisaient un concept malingre (des séries policières niaises et sans intérêt : L'Amour du risque - Hart to Hart - par exemple) et se donnait à coeur joie de se moquer de ses consoeurs.

L'alchimie entre les deux acteurs est tellement intense




que l'on en vient à se demander si tout n'est que fiction !


Mais ceci est une autre histoire...


Je n'ai jamais été fan de Bruce Willis (son cinéma n'est pas du tout le mien) et de Cybill Shepherd je me souvenais surtout de son rôle dans le film de Scorsese, Taxi driver. J'ai fait connaissance, jour après jour, de ces deux acteurs avec la plus grande des objectivités et je dois reconnaître que Cybill Shepherd pouvait rivaliser avec une Katharine Hepburn et Bruce Willis, l'oeil goguenard, le mot impertinent et le smoking de travers, n'avait rien à apprendre des grands acteurs des années 40 et 50.

Deux coffrets DVD sont sortis en France. Ils couvrent les saisons 1 à 3. Nous attendons avec impatience les deux derniers.
Quelques extraits vidéo ici sur l'excellent site David and Maddie.

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Dilettante. Pirate à seize heures, bien que n'ayant pas le pied marin. En devenir de qui j'ose être. Docteur en philosophie de la Sorbonne. Amie de James Matthew Barrie et de Cary Grant. Traducteur littéraire. Parfois dramaturge et biographe. Créature qui écrit sans cesse. Je suis ce que j'écris. Je ne serai jamais moins que ce que mes rêves osent dire.
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