jeudi 5 avril 2007
Souvenez-vous de ma "terrible aventure".
Ce matin, dans les mains du facteur, un colis de Lady K.
Les gants couleur guimauve sont de retour.
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Libellés :James Matthew Barrie,Londres
Approchez !
Approchez, mesdames et messieurs ! Vous aussi, les enfants, mais essuyez d'abord vos mains tachées de chocolat et secouez vos miettes. Oui, pour les oiseaux que Frédéric Clément aime tant, mais aussi en hommage au spectacle. Fermez les yeux et avancez.
Plus près.
Oui, là. Ne bougez plus.
Contemplez. Ecoutez. Respirez.
Si vous sentez, soudain, vos pieds décoller de la terre ferme, si votre coeur fait de drôles de bruits, et que vos mains se mettent à battre, ne vous faites pas de soucis, ne luttez pas, laissez-vous emportez par la brise parfumée. Le phénomène est bien connu, identifié et circonscrit par la Faculté de Médecine de Paris, et il ne se passe rien, sinon une chose très normale. Vous êtes emballés, enthousiasmés, charmés, ensorcelés, épatés, enivrés, exaltés... Vous devenez fou ! Il n'y a aucun remède et c'est une maladie contagieuse que vous transmet l'auteur.
Vous lisez Luminus tour.
Le voyage a débuté, vous ne vous étiez presque pas aperçu, et vous n'avez pas envie de rentrer à la maison, car votre foyer est ailleurs, dans votre imaginaire. Qui aurait le coeur de vous demander de sauter à pieds joints dans votre existence, ce petit point, ce petit pois séché, que vous entrevoyez du ciel sur la terre, en bas tout en bas ? Ne vous en faites pas : vous ne risquez pas de tomber. Vous volez déjà et on n'a jamais vu, au grand jamais, personne tomber du ciel.
De Frédéric Clément, je ne savais rien, avant de recevoir un petit mot sur ma page My Space. Il est apparu, dans mon esprit, sous le déguisement d'une bizarre image mentale, comme un magicien, peut-être chaussé de bottes de sept lieues, vêtu d'une cape et d'un haut-de-forme, qui est en réalité un coffre aux trésors, et de gants en peau d'astre poli. Il est presque impossible de parler de Luminus Tour, même si Vanessa et Florizelle l'ont déjà fait avant moi, car le livre ne se laisse pas capturer avec autant de facilité. Il vit sa propre vie et n'a pas tellement envie d'être dérangé. Prenez-le délicatement et posez-le sur vos genoux tendres. Il s'ouvrira seul. Si vous êtes réellement une belle âme, il vous montrera ses secrets, mais ne dérangez rien.
Parlons de choses évidentes, en espérant, que nous pourrons, par cette diversion, nous saisir du fil doré qui dépasse du livre - et qui n'est, en aucun cas, un marque-page. Tirez dessus, pour voir, et vous risquez bien des surprises !
Luminus Tour est en quelque sorte la suite de celui-ci :
Les deux livres ayant été écrit pour Mademoiselle Alys, la fille de l'auteur, à l'occasion de ses cinq ans, puis de ses quinze ans, car même les princesses vieillissent (grandissent). Luminus Tour est une promenade, une quête en quatre-vingts heures au pays des pays des contes de fées. Vous y croiserez James Matthew Barrie, Lewis Carroll et son Chat, Dorothy d'Oz, Peau d'âne, Andersen peut-être, et bien d'autres contes en formes de clins d'oeil, de grains de peau ou de beauté, de minuties, de clefs, de coeur, de tic tic... Un bric-à-brac coloré et poétique qui vous étourdira un peu, car il y a au moins dix belles idées par pages, que ce soit dans le choix des mots ou des tournures, ou bien dans l'éblouissante mise en page. A la limite, un esprit chagrin dirait que trop c'est trop. Pas moi, car je suis une gourmande, une affamée permanente.
[Le seul bémol : pourquoi ce livre est-il imprimé en Malaisie ? En France, ne sommes-nous plus capables ? Cette découverte pince mon coeur et le retourne à l'aide d'une épingle à nourrice... ]
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Libellés :lecture enchantée
mercredi 4 avril 2007
(Je dédie ce petit billet à Marie et à Siréneau.)
Autant le dire tout net, je joue encore avec l'idée de couper les roses de décembre, ou d'espacer les floraisons, parce qu'il m'est parfois difficile de concilier mon écriture extérieure (celle que je vous destine inconsciemment, n'écrivant au fond que pour moi et quatre ou cinq personnes essentielles, dont Jean-Christophe et ma Fauna , qui possède très certainement la plus belle plume du net - ne te fâche pas, ce n'est que la vérité !) et ma prose intérieure, celle qui ne s'abandonne d'encre que sur mes cahiers de fiction, hors de la vue des autres. Je reconnais être, ici, dans une facilité qui m'est désagréable. Je veux prendre des risques et je ne le puis ici, devant témoins. Je ne sais que radoter entre les pétales. En décembre dernier, j'avais déjà cette idée, je ne peux promettre de continuer si cela compromet mon regard sur la page à rayures. Par avance, lecteurs anonymes, ne m'en veuillez pas si, un jour, je succombais. Après bientôt 800 billets et un an et sept mois de présence quasi-quotidienne, je trouve que ce serait très honorable. Pour les autres, les véritables amis, je serai toujours là. Et puis du sang neuf prendra la relève. Il me reste 4 billets à écrire et mon voyage en Ecosse à partager. Ensuite, je verrai bien. Je suis si versatile.
Ce film tombe bien dans ma reconquête de ma culture allemande, que j'avais laissée en gâtine depuis quelques années, ne connaissant plus d'elle que les grands textes philosophiques. J'avais oublié le plaisir de lire et d'écouter cette langue un peu râpeuse au toucher- telle la langue d'un chat qui vous agace consciencieusement la peau et vous plaît beaucoup dans ce désagrément -, mais si favorable, cependant, comme toutes les choses un peu difficile, à l'extase poétique.
Personne ne sait très bien dire comment il faut agir pour créer quelque chose de digne. Pourtant, d’instinct, si l’on n’est pas tout à fait handicapé par une cervelle hypotrophiée, on sait reconnaître la bonté, la beauté et la distinction, là elles existent. Ce n’est pas tant une question de tenue que de simplicité dans l’énonciation (cela n'empêche pas la complexité du propos ou sa profondeur), d’aisance ou de facilité, d'évidence, d'intuition intellectuelle (puisqu’il paraît, selon Kant, que cela n’existe pas). Cette reconnaissance ne demande aucun effort de la part de celui qui regarde ; elle entre en lui d'un grand coup et se répand. La douleur vient après, tellement longtemps après que l’on ne sait plus qui a porté ce coup. Je crois que ce film-ci répond à cette interrogation qui est mienne : qu'est-ce qu'une oeuvre honnête ?
Cela ressemble peut-être aussi à "La sonate de l'homme bon". Un ami intime l'offre à l'un des héros de ce film, avant de se suicider, brisé par le pouvoir totalitaire, qui tue presque sans se salir les mains, par simple empêchement d’exister. Qu’est-ce que la bonté ? Vous le savez, vous ? Moi, je crois que c’est ce qui reste en dernier, quand on est dépouillés de tout ce qui nous masque à nous-mêmes. La bonté ne s’entrevoit que dans l’instant, à la fin du monde, d’un monde. C’est aussi le sujet de ce film beau et sobre comme une pluie d’automne.
Deux hommes, une femme et l’Allemagne de l’Est. Voici l’argument.
L’un est un squelette, une carcasse vide, qui se déplace sans bruits inopportuns, toujours habillé d’une grisaille
qui n’est haranguée, silencieusement, que par ses yeux vifs, qui scrutent avec application le visage du mensonge. Le regard est fixe, bleu marine, presque noir. Il est vieux avant d’avoir l’âge. Son monde est hermétique. Il accomplit sa besogne de fonctionnaire de la terreur sans états d'âme ou réflexion ; il est dévoué à une efficience toute kafkaïenne. Dans la froideur et la précision du geste, il s’enfonce dans votre esprit. Le soupçon est sous-cutané. La cruauté n’est que rigidité du visage qui ne s’affaisse jamais, pas même pour pleurer. La larme qui coule sur son visage, un court instant, semble être suintée par les pores de sa peau plutôt qu'enfuie du contour de l'oeil. Cette scène, en particulier, mérite d'être retenue. L'homme, qui enferme les autres, l'automate, l'arme de précision du pouvoir, ne peut sortir de lui-même. Juste punition, pense-t-on d'abord. Le rire lui est interdit, puisqu'il ne peut déborder de l'attitude robotisée qui a été programmée en lui. Son appartement est froid, rangé, propre. Tout est très logique, jusqu'à l'absurde, jusqu'à l'angoisse, la nôtre, car lui ne déraillerait pas.
Il épie les faits et les gestes d'un couple toute la journée. La nuit venue, il se paie occasionnellement une grosse pute et prend un instant le service rendu pour de la tendresse. C'est à ce moment précis que l'on entre avec lui dans le chemin de la compassion. C'est à ce moment également que, peut-être, il commence à regarder ses « proies » différemment. Il va perdre ce qu'il va gagner et réciproquement. Il y a une comme une passation de pouvoirs inconsciente entre celui qui écoute et regarde (et vit par procuration tout ce qui lui fait défaut) et celui qui ignore l’être. Tout le film va jouer sur ce manque et cette recherche d'équilibre que l'on appelle peut-être le suspense et qui doit s'achever dans une chute, plus ou moins brutale.
L’autre homme, celui qui est épié sans le savoir, qui ne l'est que parce qu'il est « trop honnête pour l'être réellement » d’après les dirigeants, mais qui l'est surtout parce qu'il est l'amant d'une femme convoitée par un ministre, est un auteur à la mode, qui ne fait ni l’effort ni le commerce de la lucidité.
Il oeuvre de facilité, dans le privé comme dans le professionnel ; il est doué pour le bonheur, sans lâcheté ni courage ou soucis particuliers ; il partage la vie d'une jolie femme, une actrice ; ils sont heureux, lui l’est. La femme, portrait idéal de l’actrice, est le point de contact entre les deux hommes, à cause de ses fêlures (elle ne croit pas en son talent, véritable pourtant, et se drogue pour tenir sur scène) qui vont les contaminer.
La faiblesse, qui est sa qualité dominante, est d’abord impossible, à froid, sans révélateur, à l'agent de la Stasi, car elle n'est pas inscrite dans son cahier des charges; elle est aussi impossible à l'auteur mais, dans le cas précis, parce qu'il ne s'est jamais mis dans la situation d'être pris de cours ou en danger véritable. Tous les deux ignorent ce qu'est la gélivure, bien qu'ils vivent aux antipodes l’un de l’autre.
C'est par la femme que les deux hommes vont évoluer l'un vers l'autre, sans le savoir. Lorsqu’elle dit à l’agent de la Stasi qu’il est « un homme bon », elle le libère définitivement de son armure d’insensibilité. Il est prêt à perdre.
L'un des deux hommes va gagner en force et l'autre en faiblesse, dans un équilibre parfait, qui apparaît à la fin du film, dans l'acte de reconnaissance (un livre est dédié, qui reprend le titre d'une sonate qui avait fait couler la larme sur le visage de "l'ange gardien" des écoutes téléphoniques) exercée par l’auteur envers l’autre, qui lui a sauvé la mise (vie). Mais il faut une victime expiatoire à ce double acte de rédemption. On devine que la femme doit mourir, comme les doigts tachés de sang qui marquent le premier texte dissident et révolté de l'auteur le préfigurent.
On pourrait apprécier ce film de ce seul point de vue divergent, faisant fi de ce qui pourtant donne son sujet au film : le travail de la Stasi au sein de l'Allemagne de l'Est.
J’ai choisi de comprendre le film avec ce prisme.
Peu de films allemands obtiennent en France une reconnaissance. L'un des derniers était le très beau Goodbye Lenin de Wolfgang Becker, dans un registre nettement plus léger, mais tout aussi réussi que ce thriller (car cela en est un !).
J'avais quinze ans lorsque le mur est tombé. J'étais déjà indifférente et je n'en ai que peu de souvenirs. Ce film m'emmène là où je ne suis jamais allée, car on n'a pas besoin de courage véritable à mon âge, à mon époque, en France. Nous sommes des privilégiés. Pour combien de temps encore ?
Florian Henckel von Donnersmarck est un nom que je grave dans ma mémoire ; j'aimerais savoir ce que seront ses prochains films ; j'ai le plus grand mal à savoir ce qui lui appartient en propre dans ce film, car je crois que les acteurs, dont la splendide Martina Gedeck, l'ont guidé plus qu'il ne les a dirigés. Et je ne manquerai pas de suivre la trace d'Ulrich Mühe, dont le destin m'importe infiniment plus que celui de l'acteur Sebastian Koch, malgré le charme brûlant et sensuel de ce dernier. Ulrich Mühe ne possède pas ce regard, qui m'a transpercée, sans raison, et ce n'est pas qu'une question de rôle. Je voudrais savoir ce qu'il a vécu pour le posséder aussi entier et impossible à briser.
Libellés :Allemagne,cinéma,La vie des autres
"Les questions ne sont jamais indiscrètes, mais parfois les réponses le sont".
Qui pourrait contredire, sur ce point comme sur bien d'autres, cet esprit remarquable qu'était Oscar Wilde ? Vanessa est si jolie - je l'imagine ainsi, car son journal est bien délicat et il ne peut en être autrement- que j'accède à sa demande concernant un questionnaire (un de plus qui traîne sur le net pas très net), mais je vous préviens que c'est la dernière fois ! Comprenez bien que je suis atrabilaire et que j'aime ma tranquillité. J'ai horreur des sujets imposés. Je ne sais pas danser sur le même rythme que les autres et, quand j'essaie avec de la bonne volonté, je me tords les chevilles. Pardonnez-moi de ne pouvoir mieux m'acquitter de la tâche.
De plus, j'ai déjà plus ou moins répondu à ces questions et j'ai dressé une autre liste ici. Ce préambule étant achevé, je crois que les livres aimés ou haïs en disent plus long sur nous que nous ne le pensons. Il est également vrai que cette aveu en forme de liste n'est pas tout à fait authentique dans la mesure où je pourrais fournir d'autres réponses tout aussi légitimes.
- Les quatre livres de mon enfance :
Mon enfance fut indigente et je n'ai de cesse de la raccommoder.
Lire était un acte de provocation qui ne pouvait s'accomplir sans danger et toujours en cachette, de jour comme de nuit. Je suis née chez des illettrés pour qui les mots devaient cogner sur la gueule plutôt que vous éclabousser joyeusement la pupille. D'où ma répugnance à verbaliser de gorge. Mais j'eus quelques marraines de papier et ce privilège changea la destinée de Miss Holly tête de bois, coeur de sucre et âme en verre pilé. Depuis, le carrosse ne s'est jamais changé en citrouille. Ouf !
Je me souviens cependant parfaitement des livres d'Enid Blyton
et, sur ce point, je ne puis guère être originale, puisque je partage ce penchant un peu coupable (Enid Blyton n'était pas une styliste inoubliable) avec les gens de ma génération. Toutefois, je crois que je puis avouer que ses livres m'ont permis de tenir dans mon cachot et que, bien des années après, j'ai racheté ces anciennes éditions en occasion (je désirais les couvertures d'époque), afin d'entretenir ma mémoire et ma colère. J'aimais beaucoup les îles qu'elle faisait surgir avec beaucoup de facilité et je m'en inventais aussi quelques-unes avant même de connaître Sea Cook. Claude, le personnage du Club des Cinq, était une jeune personne que j'aurais aimé être. Les enfants étaient plus fortiches que les adultes dans ces divers livres et c'est ce qui me plaisait.
Le Petit Chose d'Alphonse Daudet, parce que c'est moi, dans les moindres détails. J'en ai parlé ici en long et en large, mais pas tant que ça. Je ne dirai rien de plus à son sujet, car ce serait en dire trop à coup sûr. Je me souviens simplement de mon choc en découvrant, pour la première fois, que mes pensées et mes sentiments n'étaient pas originaux et pouvaient être réverbérés par un étranger, qui, soudain, m'offrait une enclave de normalité au sein de ce monde étrange où j'avais germé trop vite.
La case de l'Oncle Tom de Harriet Beecher Stowe (en version non abrégée, bien sûr). J'aimais les sacrifices d'enfants, comme celui de l'ange blond, Evangeline. J'ai toujours été un peu sadique. Pourquoi aurais-je dû être la seule à souffrir ?
"Adieu, enfant bien-aimée ! les portes brillantes, les portes éternellessont closes sur toi. Nous ne reverrons plus ton doux visage ! Malheur àceux qui l’ont vue entrer aux cieux lorsqu’ils se réveilleront, pour ne plustrouver que le jour terne et gris de la terre, et toi, sa lumière, à jamaiséclipsée !"Les Quatre filles du Docteur March de Louisa May Alcott (avant de découvrir, bien plus tard, à mon soulagement, qu'il y avait quatre romans et non pas seulement cette moitié que j'avais lue), La petite maison dans la prairie de Laura Ingalls Wilder ou la série Anne et la maison aux pignons verts de Lucy Maud Montgomery conservent toute ma tendresse aujourd'hui encore.
- Les quatre écrivains que je lirai et relirai encore :
Louis-Ferdinand Céline ;
James Matthew Barrie ;
Mervyn Peake ;
Marcel Proust, car lui et moi nous n'en avons pas terminé. Inutile de justifier la présence des trois autres tant elle est évidente pour ceux qui me connaissent un peu.
- Les quatre auteurs que je ne (re)lirai jamais :
Virginia C. Andrews. Adolescente, j'avais été captivée par sa saga des Fleurs captives. En effet, ces ouvrages publiés par les éditions J'ai Lu sont terriblement mal écrits et destinés à des écervelées. Beaucoup d'ouvrages ont été publiés après la mort de son auteur, car son nom est devenu une sorte de franchise ! Mais l'histoire était et demeure fascinante à mes yeux : une mère qui enferme ses quatre enfants dans un grenier pendant des années, afin de palper un gros magot et qui, peu à peu, les empoisonne à l'arsenic. Il est aussi question d'inceste et de relations plus ou moins perverses.
95 pour 100 des "auteurs" vivants. Les mauvais choix de lecture, assez rares, sont les fautes que je me pardonne le moins.
- Les quatre livres que j’emmènerais sur une île déserte :
Non pas parce que ce sont mes livres préférés, mais parce qu'ils me paraissent capables d'être lus et relus, avec des plaisirs divers, je mettrais dans mon baluchon :
L'homme sans qualités de Musil (oeuvre majeure, stimulante, déroutante, que l'on peut ouvrir à n'importe quelle page) ;
Tom Jones de Henry Fielding (j'ai de la sympathie pour ce bâtard et Fielding possède un sacré esprit) ;
A la recherche du temps perdu de Marcel Proust (encore lui !) ;
La phénoménologie de l'esprit de Hegel (parce que j'aime me torturer ou, plus exactement, parce que c'est une oeuvre qui demeure mystérieuse pour moi malgré mes lectures).
- Les quatre premiers livres de ma liste à lire :
J'ai des centaines de livres en attente et je n'exagère, hélas, pas. Je me shoote aux livres (et à autre chose). Alors, je pioche parmi les derniers achetés (depuis mon retour de Londres ; oui, je suis consciente que je ne suis pas raisonnable) :
- Les quatre derniers mots d’un de mes livres préférés :Je préfère les débuts, je suis désolée.Alors, je choisirai ceci :"Ça a débuté comme ça. Moi, j'avais jamais rien dit. Rien. C'est Arthur Ganate qui m'a fait parler. Arthur, un étudiant, un carabin lui aussi, un camarade. On se rencontre donc place Clichy. C'était après le déjeuner. Il veut me parler. Je l'écoute."ou ceci :"Whether I shall turn out to be the hero of my own life, or whether that station will be held by anybody else, these pages must show. To begin my life with the beginning of my life, I record that I was born (as I have been informed and believe) on a Friday, at twelve o'clock at night. It was remarked that the clock began to strike, and I began to cry, simultaneously."
Merci à Vanessa de m'avoir fait subir cette petite torture. Je vous recommande chaudement son journal.
Je romps la chaîne ici et ne passe le flambeau à personne.
Libellés :liste
lundi 2 avril 2007
Je dédie ce tout petit billet à Xavier, qui, presque tous les lundis, m'envoie des liens pour me faire rire.
“Yes, of course, if it’s fine tomorrow,” said Mrs Ramsay. “But you’ll have to be up with the lark,” she added.

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En me promenant, je me suis arrêtée un instant à Murder One (une librairie qui ne parle que du crime et des assassinats de première ou de seconde classe) ;
j'ai farfouillé dans les casiers et j'ai trouvé des pièces holmésiennes d'intérêt, dont des scenarii et quelques vieilleries précieuses ou anodines. Mais mon étape ultime était située un peu plus loin.
Aller à Londres et ne pas passer chez Foyles est un crime. La librairie est mondialement connue. Que ce soit en matière de livres neufs, récents ou classiques, ou bien d'antiquités vénérables (au dernier étage, j'ai eu entre les mains l'édition originale illustrée par Rackham de Peter Pan dans les Jardins de Kensington ! J'ai découvert, parmi les cinquante planches en couleur et les 12 illustrations noir et blanc, certaines qui m'étaient encore inconnues) vous trouverez votre bonheur. Le mieux est encore d'y aller sans argent ; je vous le recommande. Hélas, il me restait de l'argent de poche. J'ai glané quelques livres, dont je vous offre un échantillonnage.
- Un thriller que je suis en train de lire avec grand plaisir. Freud et sa bande, la "horde sauvage"comme le grand homme appelait ses disciples, sont des personnages de cette histoire haletante, où il s'agit de retrouver un meurtrier particulièrement pervers. Jed Rubenfeld a écrit une thèse ou un travail d'importance sur Freud (le bienheureux !) et on a le sentiment qu'il exploite cette connaissance sans pour autant céder à diverses tentations qui feraient mauvais ménage avec le sens du romanesque, mais bizarrement avec peut-être trop de retenue, cajolant un vice inverse de celui attendu. L'écriture proprette, qui adopte à la fois la narration en première personne et celle du narrateur omniscient, est plaisante mais elle manque de vivacité, de nerf, de piquant. Néanmoins, le livre demeure fermement entre les mains et la lectrice appliquée, imbibée de freudisme, que je suis savoure des clins d'oeil et des perspectives qui frôlent de temps en temps le parodique (involontairement, semble-t-il). Freud était quelqu'un de très drôle et je regrette que beaucoup l'ignorent. L'enquête est bien menée mais manque d'ambition. A moins que le final ne m'emporte - ce dont je doute.
- Petit détour chez Virginia Woolf, un auteur dont la prose m'a toujours beaucoup inspirée et cette collection-ci est très élégante avec sa tranche dorée et son délicat papier : elle enveloppe à merveille sa prose.
- En occasion, mais en parfait état, mon magicien de mari a trouvé ce livre :Il s'agit d'un ouvrage plutôt universitaire (synonyme de sérieux mais pas d'assommant), illustré (mais en noir et blanc) qui recense les divers courants et oeuvres que l'on peut qualifier de préraphaélites. Excellent aide-mémoire et puits dans lequel je me noie volontiers.
- Un livre indispensable pour ceux qui s'intéressent aux comptines, aux berceuses et autres petites histoires anglaises, celles qui nourrissent la culture et l'imaginaire anglo-saxons, et qui ont parfois servi de fil conducteur à certains romans d'Agatha Christie :
- Un petit cahier, pour un usage futur, édité par la National Gallery (où je n'ai pas eu le temps de retourner), qui représente Jane Austen sur sa couverture, un auteur important pour votre Holly en sucre et en verre pilé.
Les deux auteurs restituent les textes dans leur contexte historique, nous en explicitent le sens et nous en découvrent les origines, avec beaucoup de précision. Plus de cinq cents Nusery Rhymes sont passées en revue et au tamis d'une érudition indubitable.
Et maintenant ?
Beaucoup de travail en perspective : finir le gros volume Barrie qui devrait voir le jour en 2008, écrire un petit portrait de l'Inspecteur Morse (l'article est dans ma tête) très rapidement pour le volume Maigret de la Bibliothèque rouge, préparer le voyage en Ecosse...
Et, dans cette délicieuse idée, je m'allonge et me perds dans cet ouvrage et effleure les contours d'une carte des lieux :
Puis, je me reposerai, en écoutant ces deux disques qui nous encoconnent dans l'atmosphère du film noir :
Ce double disque est un paradis pour tous ceux qui éprouvent une excitation brutale aux évocations de Laura, du Faucon Maltais, du Troisième homme, de Gilda, de Key Largo, de La femme au gardénia, de Bob le flambeur... La part belle est faite aux films américains, c'est légitime puisque le modèle du genre n'est pas français.
Chandler, Goodis, Hammett, Irish... Je vous rends hommage et porte le deuil pour vous, même si je ne suis pas une femme fatale.
Bientôt, je reviendrai vous parler très bientôt des jolies pensées de Frédéric Clément :
Ce livre, presque trop beau pour être vrai, vous emmènera loin et vous apercevrez l'ombre de James Mathew Barrie et celle de Lewis Carroll... Mademoiselle Alys a décidément bien de la chance d'avoir un tel papa et cela me ferait presque regretter de n'en avoir jamais eu ! Juste un battement de coeur et une larmichette plus tard, j'oublie cet inconsidéré regret et je prends mes aises dans cette quête poétique.
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dimanche 1 avril 2007
[Le premier film qui date, lui, de 1938 d'Anthony Asquith et de Leslie Howard, avec dans les rôles principaux Leslie Howard et Wendy Hiller]
Extrait du premier film cité :
lorsque j'ai visité Covent Garden, encouragés que nous fûmes par Robert à nous délecter de l'endroit.
Dieu merci, moi, j'ai épousé mon Pygmalion. Beaucoup semblent avoir oublié que la fin écrite par ce vieux grincheux de Shaw n'est pas celle attendue par le public. Volonté qui ne fut pas respectée ni par les films ni par la comédie musicale. Et l'auteur de s'expliquer dans une sorte de postface à sa pièce sur son choix de séparer les deux destins.
"This being the state of human affairs, what is Eliza fairly sure to do when she is placed between Freddy and Higgins? Will she look forward to a lifetime of fetching Higgins's slippers or to a lifetime of Freddy fetching hers? There can be no doubt about the answer. Unless Freddy is biologically repulsive to her, and Higgins biologically attractive to a degree that overwhelms all her other instincts, she will, if she marries either of them, marry Freddy. And that is just what Eliza did."
Eliza épouse donc Freddy parce qu'elle aura le dessus sur lui ? Mauvais choix (et analyse psychologique biaisée de Shaw) selon moi. Elle va s'ennuyer.
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Libellés :Audrey Hepburn,Londres,My Fair Lady
Je ne pouvais décidément pas refermer l'album londonien sans glisser un clin d'oeil en direction de mon ami Robert et de son épouse Sue, qui nous ont conviés à un spectacle hilarant,
comme seuls Londres ou Broadway sont capables d'en monter. A Paris, les comédies musicales sont grotesques et minables. Tant mieux ! Dans bien des domaines, les français ne méritent que du son et une sacrée avoinée. Ici, comme peut-être ailleurs, on ne peut plus rire de rien, surtout pas de certaines religions et encore moins se gausser de certaines préférences sans être accusés de racisme, de fascisme, d'avoir l'esprit à l'extrême-droite, etc. Le plus sage est de fermer sa gueule avec une fermeture éclair et un cadenas. La morale change d'habits au gré des situations. C'est un caméléon et un thuriféraire. Je parle bien entendu de la fausse morale, celle qui sévit dans la manifestation publique et qui recouvre les bas instincts privés.
Lorsqu'il s'agit de prendre fait et cause pour un assassin - que l'on nommera au mieux un "dissident", "un révolutionnaire", ou mieux encore, je fais confiance à tous ces gens - en cavale, vous pouvez compter sur certaine coterie bien pensante pour hurler avec les loups gras et rebondis. Hélas, ce ne sont pas les loups des contes de fées, mais bien des mercenaires, dévoués à des idées haineuses. Leurs mains sont ensanglantées mais vous trouverez toujours un écrivain, un pseudo-philosophe (avoir une maîtrise de philosophie n'a jamais délivré un titre de philosophe à personne, ce n'est pas non plus une indulgence signée pour tenir des discours criminels). Lire, à ce sujet, l'article sensé de Max Gallo dans le "Figaro Magazine" en date de cette semaine, "La fascination pour le terrorisme perdure au sein de notre élite." Vous savez bien que je ne fais pas de politique. Je vous ai déjà dit que parler de cul, de fric ou de politique ne m'intéresse pas.
Je suis trop misanthrope pour me soucier de la marche du monde, qui n'a pas besoin de moi pour sombrer, chaque jour davantage, dans l'obscurantisme (un "miracle" est à la une des journaux !), la haine et la connerie.
Tout ceci est franchement émétisant. Ainsi va notre monde que l'on ose à peine nommer de crainte du procès ou du lynchage public. Vous voyez : je ne cite personne ; je me contente d'arabesques ; je me vautre dans l'allusion. Je prends soin de ma petite personne.
Cela dépasse la crainte des coups ou le confort de l'hypocrisie quotidienne, pour laquelle certains sont plus doués que d'autres. La France n'est pas le seul pays. La Warner a supprimé, il y a deux ou trois ans, certains dessins animés de Tex Avery sous prétexte de respect et de dignité à l'égard des noirs (devrais-je dire "black" ou "personnes de couleur" pour prouver que je ne suis pas raciste ? Suis-je, moi-même, blanche ou de profil caucasien ? ). Comment accepter tant d'aveuglement et de bêtise ? Bientôt, on censurera Le marchand de Venise de Shakespeare et d'autres oeuvres littéraires sous prétexte que des usuriers y sont présents. A-t-on oublié que les autres ne pouvaient être usuriers, à cette époque, puisque leur religion ne le permettait pas ? Est-ce cela signifie que l'on est raciste et que Shakespeare était un fasciste (mot employé à tort et à travers) ?
Le racisme s'enracine loin et profond lorsque l'on oblige les gens à ne pas employer certains mots, lorsque l'on soupçonne son prochain de penser mal, lorsque l'on introduit une orthodoxie dans le langage et la pensée. Nous devons traiter autrui comme nous-mêmes, dans l'idéal, car il n'en va jamais ainsi puisque nous nous préférons toujours. Cependant, l'inégalité, même si elle procède d'un désir de "discrimination positive", est en soi l'entérinement du racisme. Ce paradoxe absolu qui consiste à être raciste, à favoriser une distance entre les êtres, en désirant combattre ces vils penchants, peu de politiques ou de citoyens semblent le relever ou même le comprendre. De même, cette notion imbécile de "parité" dont on a nous a gavés. Être une femme ou un homme ne confère aucune once de plus-value. Les hommes et les femmes ne sont pas égaux ; ils sont différents.
Qu'y a-t-il de plus beau dans l'univers que la différence ? Mais la différence n'est pas discrimination.
Combattre le racisme, la discrimination, la haine, ce n'est pas faire une gentille loi, c'est agir individuellement, dans le repli de sa conscience morale, dans la charité (l'agapè) que l'on doit au prochain. Nous sommes tous des êtres singuliers. Les meilleurs d'entre nous, en tout cas. Il n'est, hélas, de discrimination que négative.
Dans le même temps, personne ne s'offusque que des pédophiles notoires publient des romans ou des journaux de leurs crimes - car, dans le cas précis, il s'agit bien d'actes pervers, qui détruisent des enfants (mineurs dans leur esprit et dans leur corps) qui ont eu la malchance de naître à Manille, par exemple.
Le politiquement correct sévit partout. Y compris sur les blogs, puisqu'il est de bon d'afficher que l'on aime son prochain, qu'on le révère. Flattons dans le sens du poil ! Même mon chien y trouverait à redire car il me mord lorsque je suis trop câline. On irait bien, sans précautions particulières, jusqu'à lui lécher le cul si l'on était assuré d'y trouver quelques lecteurs de plus. Nous en connaissons tous qui procèdent ainsi. Soyez vigilants. C'est plus facile à attraper que la scarlatine ou les oreillons (que vous ayez ou non des couilles, c'est dangereux). Je me demande même si, depuis tout à l'heure, je ne suis pas atteinte de ce mal et si ce billet n'est pas politiquement correct ! Je commence à souffrir d'érythème.
Mais là n'est pas la question, car j'avais envie de parler de ce spectacle pythonesque avec lequel je vous ai alléchés. Spamalot (extraits vidéo ici)
[Une image du somptueux décor]
est une variation sur Monty Python and the Holy Grail mais l'on retrouve aussi quelques séances de Monty Python's Life of Brian.
Petite chanson que je dédie à tous les grincheux de l'existence :
Le mythe et les légendes arthuriennes (chers à mon coeur), ainsi que le diktat du politiquement correct (je me demande sincèrement si certaines scènes pourraient être montrées à Paris sans un risque de procès), sont mis à mal pour notre plus grand plaisir. Tous les membres de la clique Monty Python n'ont pas apprécié de la même manière ce spectacle qui reprend leur univers. Je me suis laissée dire que Terry Gilliam et Terry Jones n'avaient pas adoré. Néanmoins, j'ai fort apprécié l'irrévérence de certaines scènes et le dynamisme exacerbé de chacun des acteurs. En ce qui me concerne, je n'ai pas été lésée : j'ai reconnu leur ironie et leur humour décalé et je n'ai pas eu le sentiment d'une trahison, bien au contraire. Eric Idle a écrit le livret de la pièce, ce qui est un petit gage d'authenticité. Mike Nichols en personne a dirigé les acteurs.
J'ai compris la quasi-totalité du spectacle - ce qui prouve indubitablement que les acteurs articulent correctement - mais je sais que certaines références fines m'ont glissé entre les deux oreilles. Si vous avez l'occasion d'assister à ce spectacle, n'hésitez pas.
Le rire est ce qui nous sauvera tous et, d'abord, de nous-mêmes.
*****
Libellés :Monty Python,politiquement correct
vendredi 30 mars 2007
Here is my heart and I give it to you
Take me with you across this land
These are my dreams, so simple and few
Dreams we hold in the palm of our hands
Never-ending Road
Loreena McKennitt
******
A thing of beauty is a joy for ever
John Keats
******
J'écris ces lignes en écoutant, avec mon sourire crochu et de travers, mon sourire en coin (my crooked smile, celui de Grizel et de Sylvia Llewelyn Davies) sur la tronche, Tom Waits et Loreena Mckennitt. La mère ou la soeur de ma petite fée personnelle, celle qui loge dans la poche gauche, m'a envoyé un coffre au trésor par la poste. Je suis un peu tremblante de découvir ton écriture, tes mots, ces choses trop belles, qui me font et me feront vivre encore plus fort. Mon enfant sauvage, mon amie de contes de fées, je ne sais pas remercier. Cela va au-delà des mots et de la pensée. Reste près de moi, toujours ; je serai là aussi pour toi autant que je le puis, tant que tu le voudras. Tu n'es pas comme ces gens qui n'ont rien compris et qui font pleurer les vieux enfants, parce que ce sont des brutaux, parce que les pleurs de ces petites personnes sont des perles qu'ils gobent. Croient-ils sonner moins creux du ventre et du crâne ensuite ? Le filament dans les yeux de ces barbares est grillé et leurs larmes à eux sont molles, sans vie à l'intérieur, alors que dans les tiennes il y a mille univers qui grouillent ; leurs poches sont percées et leurs mains vides car ils ne peuvent rien attraper de ce qui appartient à ton monde, ils ne peuvent que s'agripper à la pierre, à la roche dure et coupante, qui est leur linceul de vie. Mais la blessure ne tire aucun sang véritable de leurs plaies. Les pires, oh oui, sont encore ceux qui font semblant de savoir le chemin du terrier ou du château, du Repère dirait Barrie, et qui sont perdus dans l'entrelacs de leurs pathétiques imitations. Ce sont des voleurs et des imposteurs, mais ils ne trompent que leur enfance, ils ne font de tort qu'à l'once de vérité que nous conservons jusqu'à la mort et qui souvent dort en nous du sommeil de l'insensibilité et non de celui des sorts jetés. Claquons la porte au nez de ces gens, des infâmes, les adultes infantiles et les adultes convaincus, les inconscients, les fourbes et les êtres en toc ! Laissons vivre l'enfance, noble, fière et aveugle à ce qui la souille.
Toi, tu es inaccessible pour ces malheureux, perfides pathétiques de tout acabit, et tu rayonnes haut et loin. Continue d'éclairer le chemin pour les enfants perdus. Je vais me réchauffer dans ta lumière.
Beatrix Potter était autrefois comme toi.
Mais tu ne ressembles décidément à personne.Tu es originale.
Tout le monde, ne serait-ce que par la pléthore de produits dérivés (mais Beatrix Potter elle-même déposa le brevet d'une poupée de Peter Lapin en 1903 qu'elle fabriqua elle-même) connaît ses personnages (Jemima Puddle-Duck, Jeremy Fisher, Peter Rabbit, Mrs Tittlemouse et tant d'autres)
mais la vie de leur auteur est plus obscure pour les français, si peu intéressés, me semble-t-il (disons qu'ils ne sont pas aussi obsédés par cette époque que moi), par la littérature et l'art victoriens. Je la connais depuis longtemps et mon antre recèle ses livres et des ombres de lapins, de grenouilles, des canes... sont tapies ici et là, jusque dans le grenier.
Beatrix Potter (Cf. ce mini-billet de votre Holly en sucre et en cristal) est née en 1866, à Londres, à South Kensington (je pense que vous pouvez visualiser un peu l'endroit grâce à mes petits films), mais son coeur appartient à la campagne anglaise, à l'Ecosse. Son enfance fut assez solitaire, auprès de parents plus ou moins oisifs (son père était membre du barreau mais ne travaillait guère), et entourée d'animaux (des lapins, des grenouilles et même d'une chauve-souris). Dès l'âge de quinze ans, elle commence à rédiger un journal intime codé, qui ne sera décrypté (de quel droit, au fait ? Même s'il est toujours profitable de vivre dans l'intimité d'artistes, il n'en demeure pas moins que c'est peut-être un procédé constestable) que des décennies après sa mort. Elle manifeste un goût profond pour la nature, qui est la source d'inspiration première de son univers, scientifique, littéraire et pictural.
Son oncle appuiera sa demande afin d'être admise aux Royal Botanical Gardens. En vain, car elle est une femme et l'époque n'est pas propice à cette émancipation intellectuelle. Cette rebuffade ne la dissuadera pas de faire, par elle-même, des études et des recherches sur la faune et la flore, manifestant en ce domaine une intelligence certaine. Elle devint un mycologue respecté et des découvertes seront ajoutées à son crédit.
Henry Enfield Roscoe, son oncle, essaiera de proposer à la publication ses travaux mais la Royal Society refusera d'accepter, en vertu du sexe de leur auteur.
Elle commence à écrire et à illustrer des histoires, qui mettent en scène des animaux aux propriétés anthropomorphiques. Elle attendra d'avoir 36 ans avant de trouver un éditeur en la personne de Norman Warne. Le succès est alors instantanément au rendez-vous et elle devient très vite indépendante financièrement. Elle se fiance en secret à Norman car ses (stupides) parents s'opposent à son mariage, puis la mort lui ravit son amour avant même que le mariage puisse être prononcé.
Elle écrivit 23 petits (par la taille) livres. Sa vue baissa peu à peu et elle cessa de sacrifier à la fiction. Ses histoires sont à la fois extrêmement simples et, néanmoins, témoignent et d'une cruauté innocente, passagère, mais bien réelle :
Avec son argent, elle acheta de grandes parcelles de la terre qu'elle aimait tant. Et, puisque rares sont ceux qui meurent de chagrin, elle épousa à l'âge de 47 ans William Heelis, son notaire. Le couple n'eut pas d'enfants mais une ménagerie - ce qui revient peut-être au même. C'est ainsi qu'elle devint une fermière solide et heureuse - on peut visiter sa maison et ses terres - puis elle mourut en 1947 ; sans autre préambule, j'abrège maintenant son existence. Le cinéma, après s'être emparé de la vie de mon Jamie, avec l'inconséquence certaine que l'on sait - même si certains de ses admirateurs les plus sincères ont vu, certainement à juste titre, je l'admets à contrecoeur, une manière de permettre une rencontre avec le véritable Barrie -, s'attaque à celle de Beatrix Potter. Le film est sur nos écrans et je vais prendre le risque d'aller le voir samedi ou dimanche. Je vous en reparlerai. Je m'attends au pire ; je ne saurais donc être déçue. J'espère qu'ils sauront la montrer dans sa force, dans la vigueur qu'elle transmet à son oeuvre. Galerie de portraits. Le plus remarquable sur toutes les photos d'elle que j'ai contemplées est son sourire pincé qu'elle possède déjà enfant et qu'elle conservera jusqu'à la fin. Que signifie-t-il ?
Une photographie très célèbre de Beatrix, âgée de 15 ans, avec Spot ("tache" in French), l'épagneul adopté pendant des vacances en Ecosse (où je me rends bientôt ; je me le répète pour solidement m'installer dans cette croyance). Beatrix, à 25 ans, avec le lapin Benjamin (septembre 1891) en laisse.
A la fin de sa vie ou peu s'en faut... Les livres que je vous recommande personnellement :
La biographie peut-être la plus précise bien qu'ancienne, mais elle fait autorité :
Les travaux de Judy Taylor, qui a fait paraître plusieurs ouvrages en rapport avec Beatrix Potter. Une petite biographie, très bien illustrée, qui est un excellent point de départ :
Des lettres adressés à des enfants, qui ne manquent pas de nous la faire rapprocher de Barrie ou de Lewis Carroll :
"Je me souviens : j'avais l'habitude de croire à moitié mais de jouer sans retenue avec les fées quand j'étais une enfant. Qu'est-ce qui, mon Dieu, peut être plus réel que de conserver l'esprit qui est celui du monde de l'enfance, celui-ci étant tempéré et équilibré par la connaissance et le sens commun ?"
Beatrix Potter, son Journal, le 17 Novembre 1896 (National Trust collection). Rien ne saurait mieux dire le secret de son oeuvre, qui demeure d'une ambiguïté certaine, entre un réalisme exacerbé dans la description du monde animal et un anthropomorphisme de contes pour enfants. Derrière le charme et la joliesse, le sourire pincé de l'adulte en devenir, blessé d'avoir perdu le vert paradis, malgré tout.
********************
They lived with their mother in a sand-bank, underneath the root of a very big fir tree. "Now, my dears," said old Mrs. Rabbit one morning, "You may go into the fields or down the lane, but don't go into Mr. McGregor's garden. Your father had an accident there; he was put in a pie by Mrs. McGregor."
Le père de Benjamin Lapin finit en tourte (moins bonne j'en suis sûre que celles de Mrs Lovett)The Story of Miss Moppet The Tailor of Gloucester The Tale of Benjamin Bunny The Tale of Ginger and Pickles The Tale of Jemima Puddle-Duck The Tale of Johnny Town-Mouse The Tale of Mr. Jeremy Fisher The Tale of Mrs. Tiggy-Winkle The Tale of Mrs. Tittlemouse The Tale of Mr. Tod The Tale of Peter Rabbit The Tale of Samuel Whiskers The Roly-Poly Pudding The Tale of Squirrel Nutkin The Tale of the Flopsy Bunnies The Tale of the Pie and the Patty Pan The Tale of Timmy Tiptoes The Tale of Tom Kitten
Once upon a time there was an old cat, called Mrs. Tabitha Twitchit, who was an anxious parent. She used to lose her kittens continually, and whenever they were lost they were always in mischief ! On baking day she determined to shut them up in a cupboard.
Et les enfants sont parfois enfermés dans un placard, à moins d'être perdus par leur mère (tiens, tiens...) !
Ses personnages sont adorables mais j'ai toujours pensé qu'ils dissimulaient une froideur...
Vous pouvez vous délecter en ligne en cliquant sur les liens que je joins ici :
Avec son argent, elle acheta de grandes parcelles de la terre qu'elle aimait tant. Et, puisque rares sont ceux qui meurent de chagrin, elle épousa à l'âge de 47 ans William Heelis, son notaire. Le couple n'eut pas d'enfants mais une ménagerie - ce qui revient peut-être au même. C'est ainsi qu'elle devint une fermière solide et heureuse - on peut visiter sa maison et ses terres - puis elle mourut en 1947 ; sans autre préambule, j'abrège maintenant son existence. Le cinéma, après s'être emparé de la vie de mon Jamie, avec l'inconséquence certaine que l'on sait - même si certains de ses admirateurs les plus sincères ont vu, certainement à juste titre, je l'admets à contrecoeur, une manière de permettre une rencontre avec le véritable Barrie -, s'attaque à celle de Beatrix Potter. Le film est sur nos écrans et je vais prendre le risque d'aller le voir samedi ou dimanche. Je vous en reparlerai. Je m'attends au pire ; je ne saurais donc être déçue. J'espère qu'ils sauront la montrer dans sa force, dans la vigueur qu'elle transmet à son oeuvre. Galerie de portraits. Le plus remarquable sur toutes les photos d'elle que j'ai contemplées est son sourire pincé qu'elle possède déjà enfant et qu'elle conservera jusqu'à la fin. Que signifie-t-il ?
Une photographie très célèbre de Beatrix, âgée de 15 ans, avec Spot ("tache" in French), l'épagneul adopté pendant des vacances en Ecosse (où je me rends bientôt ; je me le répète pour solidement m'installer dans cette croyance). Beatrix, à 25 ans, avec le lapin Benjamin (septembre 1891) en laisse.
A la fin de sa vie ou peu s'en faut... Les livres que je vous recommande personnellement :
"Je me souviens : j'avais l'habitude de croire à moitié mais de jouer sans retenue avec les fées quand j'étais une enfant. Qu'est-ce qui, mon Dieu, peut être plus réel que de conserver l'esprit qui est celui du monde de l'enfance, celui-ci étant tempéré et équilibré par la connaissance et le sens commun ?"
Beatrix Potter, son Journal, le 17 Novembre 1896 (National Trust collection). Rien ne saurait mieux dire le secret de son oeuvre, qui demeure d'une ambiguïté certaine, entre un réalisme exacerbé dans la description du monde animal et un anthropomorphisme de contes pour enfants. Derrière le charme et la joliesse, le sourire pincé de l'adulte en devenir, blessé d'avoir perdu le vert paradis, malgré tout.
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Littérature
Libellés :Beatrix Potter,littérature victorienne
jeudi 29 mars 2007
Libellés :petit rien
Par son livre livre miniature,
"Qu'est-ce qui vous fait écrire, Monsieur Barrie ? demanda une des petites filles actrices pendant les premières répétitions de Peter Pan.
- Ne le sais-tu donc pas, altesse ? répondit-il. Mes doigts dégoulinent d'encre et il faut que ça sorte."
***
mais ô combien précis et fin, Roger Lancelyn Green fait preuve d'un talent que ne possèdent pas tous ceux qui ont écrit de grosses biographies consacrées à Barrie et qui diluent l'insipide dans de larges étendues. Dans cette monographie raffinée (Editions Bodley Head*, Londres, 1960) à la page 21 une citation de Barrie nous est rapportée :
"Qu'est-ce qui vous fait écrire, Monsieur Barrie ? demanda une des petites filles actrices pendant les premières répétitions de Peter Pan.
- Ne le sais-tu donc pas, altesse ? répondit-il. Mes doigts dégoulinent d'encre et il faut que ça sorte."
Oui, il faut que ça sorte. Se purger quotidiennement sur la page, comme si ce seul acte permettait de ventiler la conscience.
Tommy, l'alter ego de Barrie n'est-il pas présenté ainsi : " "C'est facile pour vous : vous n'avez qu'un esprit ! Mais si, comme moi, vous en possédiez plusieurs... !" Cette déclaration provoquait chez Tommy des larmes de désespoir."
Portrait de Barrie par Leslie Brooke. Je ne reconnais pas mon Jamie à gauche.
Gravure, un peu ratée.
Autographe de J.M. Barrie.
J.M. Barrie, Adelphi Terrace. Portrait d'Alvin Langdon Coburn , 1882-1966. Barrie semble prématurément vieilli et accablé. Ce sont ses yeux qui m'ont toujours le plus frappée. Un vieil enfant, n'est-ce pas ma Fauna ?
* Une monographie qui prend pour objet la vie et l'oeuvre de Beatrix Potter, écrite par Marcus Crouch, a été publiée chez le même éditeur, dans les années 60. Nous en reparlerons certainement.
*****************
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Barrie
Barrie
Libellés :James Matthew Barrie
mercredi 28 mars 2007
Je finis l'évocation rapide et maladroite des grands lieux barriens (mais non pas de mon voyage londonien, car il me reste deux ou trois billets à écrire) avec ce lieu très célèbre pour les lecteurs de Barrie (et pas seulement). 3 Adelphi Terrace.
Non loin de Charing Cross, j'ai retrouvé l'endroit où Barrie a emménagé après son divorce et où il a achevé son existence, en 1937.
Il logeait au troisième étage. Les Shaw habitaient en face. C'est ici, sur un lambris, que Maurice Maeterlinck écrira un hommage à Barrie et à son Petit oiseau blanc, qui est le grand-père de son Oiseau bleu.
[Photographies de l'intérieur de cet appartement que m'a transmises Andrew Birkin et que l'on retrouve sur son site]
Je signale l'existence d'une page sur les "plaques bleues" qui ornent les maisons de gens célèbres dans Londres.
**************
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Libellés :James Matthew Barrie
Le théâtre aujourd'hui. La petite boutique des horreurs est à l'affiche.
Je n'ai pas été autorisée à filmer l'intérieur du théâtre. Un Cerbère en jupons, avec du poil au menton (je rajoute cet attribut au crayon de papier sur le portrait mental qui me reste de la dame), m'a barré la route. Je ne la remercie pas. Je reviendrai, madame, avec une autorisation du directeur... et nous verrons ce que nous verrons !
Mais je ne pouvais manquer d'évoquer, même en courant, le lieu où fut donné, pour la première fois, Peter Pan, le 27 décembre 1904.
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- Dilettante. Pirate à seize heures, bien que n'ayant pas le pied marin. En devenir de qui j'ose être. Docteur en philosophie de la Sorbonne. Amie de James Matthew Barrie et de Cary Grant. Traducteur littéraire. Parfois dramaturge et biographe. Créature qui écrit sans cesse. Je suis ce que j'écris. Je ne serai jamais moins que ce que mes rêves osent dire.
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