mercredi 28 mars 2007
Lewis par misshollygolightly
Certes, je gueule un peu (beaucoup) sur cette vidéo, mais le bruit alentour, celui des voitures, était réellement assourdissant. Impression d'être un bateleur de foire - ce qui tombe plutôt bien, puisqu'une des prochaines étapes sera Covent Garden, avec une évocation d'Eliza Doolittle - ou une poissarde en regardant ce petit film. Envie d'éclater de rire. Je suis ridicule.
J'aime assez ma bêtise.
Imaginez que nous sommes en 1897. Le 31 décembre, pendant le réveillon, chez les Lewis qui ont eu l'excellente idée d'inviter Barrie
Je cite dans ma traduction le biographe par excellence, Denis Mackail, qui a écrit LA vie de Barrie et dont le travail fut titanesque : "Les Barrie ont, à ce moment-là, dîné plus d'une fois avec Sir George et Lady Lewis dans leur maison de Portland Place (...) Barrie se tourne vers l'un des convives près de lui. Et, à cet instant précis, elle [Sylvia] doit se contenter d'avoir, de l'autre côté, une vue sur son petit dos. Car il y a là, juste de l'autre côté, celle qui est vraisemblablement la plus belle femme dans cette pièce. Sylvia Llewelyn Davies, qui, cinq ans auparavant, était encore Sylvia du Maurier. Aucun des deux n'oubliera jamais cette rencontre, car ce qui adviendra bientôt sera plus que particulier et participera aussi de la légende."
[Sylvia en 1894 avec George et Jack]
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Libellés :famille Llewelyn Davies,James Matthew Barrie
"That strange and terrible summer" ended with the onset of September, and the Davieses set sail for London, Home and Wilkinson's — George to Wilkinson's for his second term, and the family to their new home at 23 Kensington Park Gardens ..." (Cf. le site d'Andrew Birkin, je souligne)
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Libellés :famille Llewelyn Davies,James Matthew Barrie
Nous cheminions d'un pas alerte en quête du Graal.
Je portais pour la dernière fois mes gants de cuir couleur guimauve :
Et puis, voilà ! Pan ! Vlan ! Flap ! Clic !
Une maison très importante.
Un lieu mythique pour la lectrice et la traductrice de Barrie que je me plais à être. L'autre lieu, tout aussi porteur d'évocations, est Black Lake Cottage, dans le Surrey, où je me rendrai un jour, car Robert m'a promis de m'y emmener.
La résidence située à Bayswater Road est le second et dernier domicile qu'il partagea avec Mary A. (de 1902 à 1909), à Londres, jusqu'à leur divorce. Le Petit oiseau blanc a été publié en 1902 et Peter Pan a été révélé au public en 1904.
Lorsque j'ai découvert cette maison, je crois bien que mon coeur a fait naufrage. J'étais, inexplicablement, pétrifiée. J'avais l'impression absurde de connaître cette maison, comme si... Comme si j'avais été familière des lieux autrefois. Je ne fais pas mon miel de l'irrationnel. Mais force est de constater qu'une vague m'a emportée loin de notre monde et que je crois en certaines présences "surnaturelles", d'autant plus que je suis une fille ultra-logique. Un paradoxe de plus à apporter à mon crédit.
Mon mari m'a suggéré de sonner, puisque la maison donnait l'allure d'une demeure habitée (par des vivants, j'entends). Je n'ai pas pu le faire. La timidité est l'un de mes plus grands handicaps. Je puis faire des choses "extraordinaires" ou excentriques (aux yeux des autres) mais je suis inapte aux actes élémentaires de la vie quotidienne (un travail mercenaire, téléphoner, entrer dans un magasin vide, etc.) !
Dieu merci, lui, appuya sur le bouton.
A deux reprises.
J'étais presque soulagée de trouver porte close.
Un homme, pourtant, nous ouvrit la porte. Je commençais à lui exposer mes raisons, avec le débit et le ton de quelqu'un qui va commettre un crime, me donnant des airs coupables, avant de me rendre compte, à ses habits, qu'il n'était pas le maître des lieux, mais un ouvrier (la maison est en travaux).
Le propriétaire arriva. En retrait. Superbe. L'Angleterre, la Tradition tout entière, reposait sur ses épaules. Le geste et le verbe étaient nobles et mesurés. Pas un gramme en excès ou par défaut. Il avait cette manière d'être au monde, un peu désinvolte, qui me fait défaut. Il y avait aussi, ce qui est essentiel, une lueur ironique dans l'oeil qui me mit à l'aise. Car je suis une sale petite roturière timide.
Je suis une souillon. Je me réprimande à chaque mouvement disgracieux : un squelette qui offense le dos du fauteuil à table, cette façon inélégante de me mordre la lèvre inférieure lorsque je bois un chocolat au lait, les gants que je retire d'un coup de dents avec violence, avec rage, les ongles que je mastique légèrement, les tics de langage. Tout ce qui trahit mon absence d'éducation pour un regard exercé et averti. Je m'en défends mais l'on porte toujours avec soi, de manière indélébile, le sceau de son éducation, et il me semble que plus on la refuse, plus elle se venge sur vous, en ressurgissant au moment le plus inopportun. Nous brinqueballons tous notre passé, un casier judiciaire qui se lit sur le visage. Peut-être est-ce la raison pour laquelle j'ai cette complexion indéformable.
Dans mon sac en plastique, il y avait mon exemplaire du Petit Oiseau blanc, que je destinais au bookcrossing et qui pouvait justifier à la fois de mon réel intérêt pour Barrie et de mon identité. J'ai commencé à parler au propriétaire des lieux, qui me regardait d'un air, d'abord interloqué, puis franchement amusé. Je lui demandai si je pouvais entrer dans le jardin. Simplement pour demeurer un instant dans la mémoire de cet écrivain, de ce frère d'âme, auquel j'ai décidé de consacrer une part de ma vie. Il a éclaté de rire, m'a poussée en avant, sans ménagement, et m'a demandé de le suivre. Notre conversation oscillait du français (qu'il parlait avec une certaine habilité) à l'anglais, l'un adoptant la langue de l'autre, délicatesse due à autrui.
Nous étions là.
Tout simplement.
Oui.
C'est ainsi que je me suis retrouvée avec mon mari dans le salon de James Matthew Barrie, sans pouvoir y croire.
J'ignorais encore qui était en face de moi.
Un Lord et une Lady (qui brodait, royalement installée dans un canapé, lorsque nous arrivâmes), comme en témoignaient la qualité de leur accueil et leur parfaite éducation. Mais je ne l'appris qu'avant de partir, lorsque la dame me remit sa carte et que je me retrouvai, soudain, démunie. Je n'avais emporté aucune de mes cartes de visite. Un comble ! J'en possède une belle quantité. Elles ont été imprimées à Venise, par le dernier imprimeur de qualité, Gianni Basso,
et portent le nom de plume que j'ai choisi. Elles sont d'un raffinement exquis, car il n'y a ni adresse ni numéro de téléphone. Je suis une citoyenne du monde : j'habite dans mes rêves. Mais je n'avais rien à offrir en retour. Le summum du manque d'éducation, ajoutez à cela un anglais de charretier, et je suis mortifiée. A l'extrême fin de l'entretien, mon mari se souvint qu'il possédait une de mes cartes, qui reposait dans son porte-cartes depuis au moins une décennie. Elle était complètement usée, voire crasseuse. Que vont-ils penser de moi ?
Ajoutez (encore) à cela que j'ai embrassé un mur (oui, encore), que j'étais à deux doigts de hurler, que j'ai manifesté un enthousiasme immodéré pour le jardin de Barrie, que je me suis extasiée devant leur cheminée quand la dame des lieux m'a indiqué que l'installation avait été certainement faite à la demande de Mary A.
Abruptement, j'ai demandé si le fantôme de Barrie leur rendait visite. Sans ciller ni rire, Lord K. m'apprit qu'il venait une ou deux fois par an, toujours le samedi et après neuf heures du soir.
Mais le propriétaire était confondant de gentillesse et ne manifesta aucune surprise de mauvais aloi face à mon comportement inapproprié - je demandai permission de les prendre en photo devant cette cheminée, ce qu'ils acceptèrent. Puis, il m'apprit qui il était, sans anticiper le cri qui succéda (le mien).
J'estime être la gardienne de leur tranquillité, donc je ne parlerai pas davantage d'eux ni de leur maison, pas plus que je ne joindrai leur photo dans ce JIACO. Je puis seulement préciser qu'il est le demi-frère du fils de l'explorateur Scott. Sa mère avait épousé le fameux explorateur Sir Robert Falcon Scott, avant de devenir veuve et d'épouser ensuite son père. Elle était une amie intime de Barrie et Sir R. F. Scott était une personne très proche de Barrie. Je connaissais, bien entendu, Sir R. F. Scott, mais seulement par les livres. Imaginez ma stupéfaction. Que diriez-vous si, d'un coup, un personnage de romans et de biographies se détachait du papier et sautait à pieds joints devant vous ?
En serrant les mains de Lord K., je tenais le maillon d'une petite chaîne au bout de laquelle se trouvait Barrie. C'est à ce moment précis que j'ai décidé de m'enfuir, n'étant plus en mesure de retenir mes larmes.
Je suis consciente que je puis me donner dans une lumière de grandiloquence, mais je n'ai rien à cacher ni rôle à jouer : je suis de cette eau.
Et c'est ainsi que mes gants couleur guimauve sont restés dans la maison de Barrie et que j'ai vécu ma terrible aventure.
Je n'ai pas osé retourner les chercher. Pour deux raisons : je suis timide (je le répète) et je ne pouvais envisager de briser le souvenir magique de ma venue en ce lieu et surtout l'idée que Jamie avait escamoté mes gants me plut tellement que nous en restâmes là. Croyez ce que vous voulez, mais personne ne retrouvera ces gants, j'en suis persuadée. J'ai demandé l'aide de Sherlock Holmes, qui est tout de même très lié à Barrie, et il m'a affirmé que Jamie était d'un naturel taquin, ce que je savais déjà... Je n'ai pas davantage oublié son amour pour les manchons des femmes, dévorante et insoutenable passion qui s'exprime dans plusieurs de ses oeuvres.
"Mais, si un tel costume n’est pas convenable, je jure qu’il y avait au moins des petites plumes bleues dans son bonnet trop coquet et qu’elle portait un manchon assorti. Aucune partie de la femme n’est plus dangereuse que son manchon. Comme les manchons ne sont pas portés au début de l’automne - y compris par les malades -, je compris, en un éclair, qu’elle avait mis toutes ces jolies choses pour m’amadouer."
Le Petit Oiseau blanc
"Elle portait un manchon de fourrure et, parfois, elle l’élevait jusqu’à son visage, comme si c’était un flacon de parfum, ou bien elle observait le monde par-dessus ce manchon et, alors, elle m’évoquait un oiseau niché dans un tronc d’arbre"
Adieu, Miss Julie Logan
Les gants guimauve seraient-ils à la fille du XXIe siècle ce que le manchon était à la femme du XIXe siècle ? Tout m'incline à le croire et je suis flattée que Barrie ait eu cette attention coquine à l'égard de ma petite personne.
Le pire est que je n'ai aucun souvenir de les avoir ôtés. J'ai enlevé un instant mon gant gauche pour serrer la main de mes hôtes, mais je l'ai remis aussitôt cette politesse rendue et je n'ai en aucun cas délesté ma main droite de son gant.
Il ne me restait plus qu'à me contenter de leurs jumeaux, noirs et patinés.
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Libellés :James Matthew Barrie
mardi 27 mars 2007
"A la seconde où j’entre dans le fumoir du club, vous devez imaginer David en train de disparaître dans le néant. Il est n’importe quel jour de la semaine, six ans auparavant, à deux heures de l’après-midi. Je sonne pour le café, les cigarettes et le brandy, je prends ma chaise près de la fenêtre, juste au moment où cette stupide petite gouvernante vient se promener dans la rue.
J’ai toujours l’impression de l’avoir sonnée."
Le Petit Oiseau blanc
N'est-il pas facile d'imaginer Barrie à l'une de ces fenêtres ?
TO BE CONTINUED...
Libellés :James Matthew Barrie
Après le 15 Old Cavendish Street, où il logea en 1890 et le 14 Gloucester Walk, où il vécut un moment en compagnie de sa soeur, Maggie, c'est la première maison d'importance de Sir James Matthew Barrie.
Il y s'y installa de 1895 à 1902.
Porthos, le fameux saint-bernard, y vécut également. Les fenêtres de la façade avant, au rez-de-chaussée, donnent sur sa salle d'écriture, nous informe son biographe Denis Mackail.
Ce fut la maison du bonheur et de tous les espoirs.
Je m'y installerais avec plaisir. C'est un rêve à portée de main (bien que j'ignore le prix du loyer). Si j'avais eu plus de temps, j'aurais demandé à la visiter... Petit regret.
Mon accent est désastreux et je recopie ce que m'écrit mon ami Robert à ce sujet, car ses explications sont excessivement claires pour ceux qui s'intéressent à la phonétique (Robert, tu es mon bon génie) :
I have just been looking at your latest videos uploaded on to DailyMotion this morning! Very nice! May I correct you on your pronunciation of 'Gloucester', please? I can imagine that this is a difficult pronunciation
to understand, but then Britain is full of strange names! We pronounce it just the same as we would pronounce 'glosster', if such a word existed. We have the name 'Gloster' which is pronounced the same. The vowel 'o' should be pronounced the same way the English pronounce the 'o' in 'Robert' and 'John'. The 'cester' part of 'Gloucester' is pronounced as one syllable, as if it were spelt 'ster', like the second part of the word 'mister'.We have the same sort of thing with the cities 'Leicester' and 'Worcester'. These are pronounced like 'Lesster' and 'woosster' ('oo' pronounced as in 'book' or 'wood', not as in 'mood' or 'food' - assuming you know the difference!).But if there is an 'h' after the 'c' in similar looking names - such as in 'Winchester' and 'Rochester', then the 'chester' part is pronounced as two syllables, exactly
the same as the city 'Chester'.
Ce n'est pas sans raison si je projette d'assister à des cours d'été à Oxford. J'aimerais beaucoup suivre des cours de philosophie ou de littérature appliquée. Bientôt.
Libellés :James Matthew Barrie
Ce sont les mots de Dickens à sa belle-soeur, Mary Hogarth, en 1835, lorsqu'il évoque son travail dans une manufacture de cirage, alors qu'il n'était encore qu'un enfant (12 ans - nous retrouvons toujours cet âge fatidique dans la littérature...) et que son père était emprisonné pour dettes. Quelle belle revanche sur la vie que le parcours littéraire de ce monstre victorien !
(Remarquez ceci : je porte des gants couleur guimauve sur ces extraits. Pourquoi sont-ils devenus noirs le lendemain, dans les Jardins de Kensington ? Cette métamorphose participe de ma "terrible aventure"...)
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m'évoque les romans où j'ai coutume de me lover - dans la position du foetus ou du grabataire (qui est la même et non sans raison). Je m'y sens en famille, comme si chaque quartier ou le moindre personnage historique constituait à lui seul une branche de mon arbre généalogique. Je remercie mes parents de m'avoir abandonnée à la naissance ; je le dis sans cynisme ni arrière-pensée, encore moins avec la voix embuée, mais du ton conquérant, railleur et très orgueilleux de Peter Pan ; grâce à eux, j'ai eu le pouvoir de choisir qui je suis, réellement. Être un enfant autochtone, comme j'aime m'appeler, n'est pas à la portée de tout le monde. J'aime ma différence.
Aujourd'hui, je l'aime.
Je me demande, tongue-in-cheek, pourquoi les parents ne rendent pas plus souvent ce service à leurs enfants.
J'ai commencé à ranger ici, dans l'herbier, mes souvenirs dans le plus grand des désordres. En effet, sitôt les valises déposées à Londres - hélas, pas les deux poches ou les deux cloques sous mes yeux, mais elles ont leur utilité : recueillir une provision de larmes afin de nourrir mes histoires, car elles sont le lait maternel de mes personnages ; je suis un pélican à ma façon, qui est parfois celle de Strindberg -, nous nous sommes dirigés en direction de l'époque victorienne.
[La Reine Victoria qui trône encore, mais dans les Jardins de Kensington.]
Avant Barrie, il y eut Dickens et le premier n'oublia pas le second, pas plus que votre modeste cicérone ne manqua de rendre hommage au Dieu du Roman. Je lui dois tant d'heures de bonheur, peut-être mes moments de lecture les plus intenses, que ce saut dans le temps est la moindre des choses.
Petit détour dans Londres, afin de rendre visite à Charles, dont l'existence est plutôt mystérieuse. Je vous recommande cette biographie, joliment illustrée, que j'ai achetée et lue sur place :
Bien que succincte et très subjective, elle constitue un agréable et précis point de départ pour faire connaissance avec le grand romancier. Peter Ackroyd est un auteur qui a mes faveurs. Sa superbe biographie de Londres
n'est pas étrangère à mon admiration. J'ai acquis aussi, lors de cette légère et diluée pause anglaise, une biographie de Shakespeare dont j'espère le meilleur.
Assez de palabres ! Je vous emmène au Dickens Museum par la pensée. Suivez-moi ! Cette maison est celle où il a achevé Pickwick et Oliver Twist.
* Sur le seuil de sa maison :
Dickens-exterieur par misshollygolightly
* Entrée :
Dickens-entree par misshollygolightly
* Son bureau :
Dickens-singe par misshollygolightly
* Dédicace de Dickens à Andersen (leur amitié fit long feu) :
Dickens-andersen par misshollygolightly
* The drawing-room (la salle de réception et non pas la salle d'étude ; j'ai fait un lapsus dans la vidéo, a slip of the tongue, même s'il écrivait aussi dans cette pièce...) :
Dickens-drawing par misshollygolightly
* Feuilletons
(comme chacun sait, Dickens publiait ses romans en feuilletons, dont voici des exemplaires) :
Dickens-feuilletons par misshollygolightly
Dickens-feuilletons par misshollygolightly
La chambre de Mary Hogarth (soeur de sa femme) :
Dickens-chambre par misshollygolightly
Dickens-chambre par misshollygolightly
Mary Hogarth était adorée par Dickens et sa mort brutale lui causa une peine durable. Il conserva ses vêtements dans un placard pendant des années et les regardait de temps à autre. Il ôta d'un de ses doigts une bague et la porta jusqu'à sa propre mort... Dora, la petite Nell et Florence Dombey portent l'empreinte de Mary.
Florence et Paul Dombey, deux personnages dickensiens adorés : vitrail. Il y a quelques vitraux délicieux dans cette petite maison.
L'autre femme, une actrice aimée de Dickens, Ellen Ternan. Il quittera sa femme pour elle, mais surtout parce qu'il était malheureux avec cette épouse usée et dépressive.
La même... plus tard. Le temps n'a aucune indulgence envers les femmes.
Un tableau de Robert W. Buss, offert à la maison Dickens par le petit-fils de l'artiste et qui me plaît infiniment. Il représente Dickens et ses personnages. Il est inachevé mais je crois que l'aime encore plus ainsi. On a le sentiment que l'ombre de l'imaginaire recouvre la réalité.
TO BE CONTINUED...
Le meilleur est à venir.
Nous allons maintenant suivre les traces de Barrie...
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Catégorie :
Littérature
lundi 26 mars 2007
Indice en rapport avec ma "terrible aventure" :
TO BE CONTINUED...
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Catégorie :
Barrie
[Source : Beinecke Library]
Un portrait de Barrie peint par Peter Scott, le fils du très célèbre explorateur Sir Robert Falcon Scott. Peter Scott était le filleul de Barrie et Jamie était un proche ami de Sir Robert Falcon Scott. A sa mort, ce dernier recommanda sa femme et son fils à la protection de Barrie. Jamie écrivit une introduction au journal de son ami.
TO BE CONTINUED...
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Catégorie :
Barrie
Libellés :James Matthew Barrie,R.F. Scott
Les cygnes des Jardins de Kensington dont parle Barrie dans The Little White Bird.
"Parfois, des cygnes abordaient l’île et il leur donnait toute sa nourriture deIls se caressent avec des coups de tête et forment un c(h)oeur des plus harmonieux l'instant d'après. Sont-ils amoureux ou en colère ? N'est-ce pas la même chose dans le fond ?
la journée, afin de les questionner à ce sujet. Dès qu’il n’avait plus rien àleur donner à manger, ces odieuses créatures se gaussaient et s’éloignaient."
Je dépose au bord de votre prunelle des petites vidéos des Jardins de Kensington (Clips réalisés en amateur ! Je suis, par avance, confuse de la qualité de ces petits films... Et la compression que j'ai dû effectuer pour les mettre en ligne n'a rien arrangé.) afin de vous donner l'illusion d'une incursion au sein de la mythologie de James Matthew Barrie.
La promenade est dédiée à mon amie Fauna, qui saura pourquoi.
Lorsque j'ai posé mes pas ici et là, j'ai pensé à certaines personnes que j'aime. J'aurais adoré, Mélanie, que tu sois ici. Et, toi, Petite Marie...
* Bookcrossing :
Bien sûr, les anglais ne peuvent qu'être étonnés de notre manière de prononcer à la "franglaise" le nom du héros, Peter Pan. Pourquoi prononcer à l'anglaise le prénom et à la française le nom ? Je devrais, si j'étais logique, prononcer "Pan" à l'anglaise, mais je crois que j'ai honte parfois de mimer l'accent anglais devant des français.
J'ai assisté à la capture du livre. Une jeune anglaise blonde, ravissante, accompagnée de sa maman est partie avec ce livre, qui n'est plus le mien. Peut-être pourrais-je suivre les pérégrinations de cet exemplaire via bookcrossing.com.
* Ma pensée à 14h45 précises :
* Petit tour des jardins :
"Mais les canards eux-mêmes, sur le Bassin Rond, ne sont pas en mesure de lui
expliquer ce qui rend le Bassin si intéressant aux yeux des enfants. Toutes lesnuits, les canards oublient les événements de la journée, excepté le nombre de
morceaux de gâteau qui leur ont été jetés. Ce sont des créatures gourmandes et
elles affirment que le gâteau n’est plus ce qu’il était dans leur jeune âge."
* Clin d'oeil :
* Une petite fille délicieuse (si j'étais un homme, on m'accuserait de je ne sais quoi, car il est de mauvais ton d'aimer les enfants à notre époque... Or, je suis une fille et je n'aime pas les enfants. Du moins, je prétends tout ceci. Mais c'est sans compter que les femmes sont plus vicieuses que les hommes, y compris dans ce domaine... Un des plus grands tabous de notre époque, qui ne semble pas prêt de s'effriter) :
* Que serait ma vie aujourd'hui si j'avais été comme cette petite fille, insouciante (l'est-elle ?) et aimée de ses parents ? Je suis persuadée qu'elle serait moins belle. Être en retard de son enfance est le gage pour moi de ne jamais mourir de lassitude.
"Et il n’avait pas, comme j’eus à Combray dans mon enfance, des journées heureuses pendant lesquelles s’oublient les souffrances qui renaîtront le soir." (Marcel Proust)
TO BE CONTINUED...
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Une graphomane séparée de son ordinateur continue d'écrire. Ce JIACO n'est qu'un journal illustré qui, au départ et encore aujourd'hui, n'est qu'un lieu égoïste où je mets mes idées à sécher. Je ne me soucie pas d'être lue en vérité, même si j'écris dans l'idée qu'une poignée de gens que j'aime me liront.
Chaque soir, j'ai donc consciencieusement rédigé mon journal de bord dans un très beau cahier que m'a offert mon amie "E." à l'âme faite de dentelle. J'avais envie d'emporter un peu d'elle en voyage et j'ai pensé à étrenner son très beau présent de la manière la plus symbolique qui soit, avec Barrie.
Je suis persuadée qu'elle aimera l'usage que j'en ai fait.
Nous avons logé à Baker Street, dans un bel hôtel, confortable et un peu luxueux.
Je ne voyage jamais en seconde catégorie. Pour le même prix, je préfère quatre jours dans un bel endroit plutôt que deux semaines dans un endroit miteux ou très moyen. Je voyage peu mais avec ce que j'estime être une élégance des lieux, de l'instant, dans un cadre propice à la rêverie et à la réflexion. Etant d'un naturel craintif et maladroit, les objets et les endroits doivent être encourageants, sinon je dépéris. Il faut que l'endroit où je vais soit de la même teinte que celui que je quitte.
A quelques mètres du Musée Sherlock Holmes, où je m'étais déjà rendue dans le passé, j'ai dressé le plan d'attaque de nos promenades, force cartes à l'appui, afin de ne pas perdre une goutte de notre précieux temps.
15 Old Cavendish Street
1890
14 Gloucester Walk on Campden Hill
(1892, il y logea avec sa sœur Maggie)
133 Gloucester Road South Kensington
(1895-1902) domicile conjugal
100 Bayswater Road, Leinster Corner
(1902-1909) domicile conjugal - DIVORCE de Barrie et de Mary A.
3 Adelphi Terrace
1-3 Robert Street
Adelphi, WC2
(1909- 19 juin 1937)
Duke of York’s Theatre
St Martins Lane
le 27 décembre 1904 : Peter Pan
88 Portland Place
Sir and Lady Lewis (le 31 décembre 1897, Barrie y rencontre Sylvia pour la première fois)
23 Kensington Park Gardens
Demeure des Llewelyn Davies
The Garrick Club
15 Garrick Street
Dickens Museum
Opening Hours
The Museum is open from Mondays - Saturdays
10.00-17.00
Sundays11.00-17.00
48 Doughty Street
Chaque étape devait nous permettre de reconstituer la figure d'un Londres qui n'existe plus mais qui, cependant, vit encore si l'on se donne la peine de regarder attentivement sous les apparences. Il suffit de soulever le rideau en feuille de soie qui n'est qu'un trompe-l'oeil... Notre quartier de résidence est stratégiquement situé pour mes voyages au centre du Londres barrien, qui dessine un cercle presque parfait en plein coeur de la ville.
Mais je n'avais pas tout prévu...
Bientôt, c'est-à-dire le dernier jour de notre pèlerinage, je devrai frapper à la porte du célèbre détective, car lui seul est en mesure de retrouver certain objet que j'ai perdu lors de ma "terrible aventure"...
(A SUIVRE...)
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Libellés :James Matthew Barrie,Londres,Sherlock Holmes
dimanche 25 mars 2007
Je vous raconterai tout. Peut-être dès demain, si j'en ai la possibilité matérielle. J'ai une quantité de photographies et de vidéos inimaginable.
Mon séjour de quatre jours fut un enchantement. Malgré la rapidité de ce voyage, j'ai vécu des moments intenses et une dilatation spatio-temporelle m'a permis de semer tous les cailloux qui étaient dans ma poche et d'en ramasser quelques-uns... et pas des moindres ! Définitivement, je crois que la chance est une déesse qu'il faut aguicher.
Mais je dois vous avouer que ce vendredi 23 mars 2007 demeurera l'un des plus beaux jours de ma vie depuis ma naissance et pas seulement parce que je me suis assise avec l'homme que j'aime dans le salon de l'ancienne maison de James Matthew Barrie. Oui, vous avez parfaitement lu. Miraculeusement, j'ai pu pénétrer dans cette maison. J'ai vécu une "terrible aventure" que je n'attendais pas et je suis persuadée que Jamie a guidé cet événement. Mais ce n'est qu'un épisode merveilleux de ce vendredi particulier. D'autres bonheurs me furent offerts.
J'ai rencontré mon ami Robert Greenham, auteur d'un magnifique petit livre en rapport avec Barrie, ainsi que sa merveilleuse épouse, Sue. Nous nous écrivons quotidiennement depuis longtemps et nous nous sommes enfin trouvés face à face. Etrangement, j'avais l'impression de le connaître depuis toujours.
Je cheminais, main dans la main, avec mon Amour de mari, dans ce lieu barrien par excellence, royaume des fées et de mes pensées les plus délicates. Robert, qui est un émule de Sherlock Holmes, nous a montré la voie et nous avons trouvé les "tombes" de Barrie dans les Jardins de Kensington.
Les fameuses "tombes"auprès desquelles Andrew Birkin, LE spécialiste de Barrie, un homme pour qui j'éprouve une profonde amitié et un respect sans limite, qui a toujours été adorable avec moi, a posé. Cette photographie est l'une de celles que je préfère.
Voir, toucher (embrasser, je le confesse) ces petites pierres était presque irréel.
Je crois bien que ma joie m'a propulsée à quelques mètres du sol, en direction des cieux. Positivement, je sautais et hurlais comme une folle.
Un écureuil m'a suivie pendant toute ma promenade. Ce n'était pas un écureuil "normal". Je vous raconterai aussi cela. Faites-moi penser à vous parler du fantôme de Barrie. Je fais un noeud à mon mouchoir au cas où...
"Mais vous ne devez pas penser que, parce que quelque part parmi les arbres la petite maison scintille, il est une chose sage de demeurer dans les Jardins après l’Heure de la Fermeture. Si les méchantes fées parmi les fées se trouvent être de sortie cette nuit-là, elles vous blesseront à coup sûr. Et, même si elles n’étaient pas là, vous pourriez périr de froid et de peur, avant que Peter ne vînt à vous. Il est arrivé trop tard plusieurs fois et, quand il voit qu’il est trop tard, il court sur ses pas jusqu’au Nid de Grive pour ramener sa pagaie, dont Maimie lui a expliqué le véritable usage. Il creuse une tombe pour l’enfant, érige une petite pierre tombale et grave dessus les initiales du pauvre enfant. Il agit ainsi, car il pense imiter les authentiques petits garçons. Vous remarquez que les petites pierres vont toujours par pair. Il les édifie en double parce qu’il lui semble qu’elles sont moins seules ainsi.
Je pense qu’on ne peut rien voir de plus émouvant dans les Jardins que ces deux pierres tombales, côte à côte, celle de Walter Stephen Matthews et celle de Phoebe Phelps. Elles se tiennent l’une près de l’autre, à l’endroit même où les paroisses de Westminster Saint Mary et celle de Paddington se croisent. Ici, Peter trouva les deux bébés, qui étaient tombés sans qu’on le remarquât de leur landaus : Phoebe âgée de treize mois et Walter, probablement encore plus jeune, car Peter semble avoir omis, par délicatesse, de mettre un âge sur la pierre. Elles reposent côte à côte, et on peut lire ces simples inscriptions :
[Photographies de Robert Greenham]
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Correction en date du 7 mai
2007 : nous avons compris notre erreur, rétrospectivement.
Nous nous sommes trompés de "pierres tombales"
! Mais, sur l'une des pierres, sont gravées les initiales
P.P., comme Peter Pan ou Phoebe Phelps. N'est-ce pas diabolique
? L'erreur était permise et le rêve de les retrouver
reste ouvert pour moi dans ses grandes largeurs. Il n'est pas
bon de réaliser tous ses désirs. Ceci n'est pas
une vague formule de consolation mais mon intime conviction. La
prochaine fois que j'irai à Londres, je les trouverai et
je me rendrai également au cimetières des animaux...
Et ma joie ce jour-là était réelle. Ce qui
importe, c'est ce que l'on insuffle à ce que l'on vit bien
davantage que les stricts faits.
Je connaissais et la vidéo et Lost Boys, je n'aurais pas dû me tromper.
Mais mes yeux voient souvent ce qu'ils ont envie de voir. Je ne m'en plains pas...
Le make-believe.
lundi 19 mars 2007
« Je trouve très raisonnable la croyance celtique que les âmes de ceux que nous avons perdus sont captives dans quelque être inférieur, dans une bête, un végétal, une chose inanimée, perdues en effet pour nous jusqu'au jour qui pour beaucoup ne vient jamais, où nous nous trouvons passer près de l'arbre, entrer en possession de l'objet qui est leur prison. Alors, elles tressaillent, nous appellent, et sitôt que nous les avons reconnues, l'enchantement est brisé. Délivrées par nous, elles ont vaincu la mort et reviennent vivre avec nous. »
Marcel Proust
« Et la mère fermant le livre du devoir
S’en allait satisfaite et très fière, sans voir,
Dans les yeux bleus et sous le front plein d’éminences
L’âme de son enfant livrée aux répugnances .»
Arthur Rimbaud, Les Poètes de sept ans
« Je n’ai que le portrait de mon père, qui est toujours muet. »
Charles Baudelaire, correspondance à sa mère, 6 mai 1861
***********************
Le détail est essentiel. Il n'est point question de frivolité mais de style. Qu'importe, à la limite, si le style a mauvais goût, tant que l'effort est à la hauteur d'une certaine originalité ou d'une volonté de s'affirmer un peu autre, à savoir soi. L'excès de singularité est de mise et qu'importe si personne ne s'en aperçoit. Au contraire, dirais-je, ce n'est en que plus louable et plus jouissif. De quoi parlons-nous au fait ?
D'une oeuvre d'art picturale ? D'un livre ? D'un film ?
De tout cela, certes, mais aussi de la vie, des choses de la vie, des immenses événements et des infimes jours sans suite. Et pourquoi pas des états d'âme. Pourquoi certains d'entre eux ne seraient-ils pas nobles et d'autres misérables ? L'esprit est-il une massive crédence, ou bien l'étendue solaire où crépite la pluie de l'âme ? J'ai envie de parler d'élégance, aujourd'hui, c'est bien normal puisque je pars pour le royaume de Barrie.
La classe est l'indéfinissable par excellence. D'instinct, je pourrais vous citer des êtres qui en possèdent (Cary Grant ou Audrey Hepburn) ou des oeuvres (Ulysse de Joyce ou n'importe quelle pièce de Shakespeare) qui l'exhalent, mais définir en quoi consiste précisément la classe me paraît une tâche plus ardue que n'importe quelle explication philosophique, fût-ce l'hypotypose symbolique dans l'oeuvre critique de Kant ou bien les trois genres de la connaissance chez Spinoza. D'emblée la notion de classe semble appeler à elle la grâce, une forme de tenue ou de rigueur et de gratuité. Et si j'ai tant de mal à la penser cela signifie certainement que j'en suis dépourvue.
Tout le monde a un style, qui, parfois, hélas, est de ne point en avoir.
Autrefois, l'éducation, la bienséance implicite, la classe sociale même, pouvaient dispenser de ce revêtement graveleux et du geste et de la parole. Aujourd'hui, le nivellement est tel que nous jouons au coude à coude. Les véritables riches éduqués n'existent plus et les pauvres ne le sont plus assez pour avoir cette honte sociale qui leur garantissait une forme d'honneur, du moins au sein de leur monde. Même si tout ceci était factice, au moins nous savions à quoi nous en tenir. L'hypocrisie avait ses lettres de noblesse en ce qu'elle pouvait s'inscrire dans le trait d'esprit cruel. La politesse et le tact réels ont disparu. La gratuité n'existe presque plus. Nous sommes dans une ère commerciale où presque tout s'achète. L'arrivisme, lui, fleurit gras et nauséabond sur ce fumier. Mais tous les petits cul-terreux de l'existence, des lettres, du cinéma, les médiocres ne sont pas à la hauteur de leur ambition, car ils ne dupent personne.
Je hais l'hypocrisie mais je la hais encore plus quand elle manque d'ambition et... de style dans son expression.
Les bonnes manières se perdent mais l'hypocrisie, elle aussi, manque de tenue. Le vernis s'écaille vite et dessous on lit les misérables desseins de l'entrepreneur en fausseté.
Tout flatteur vit aux dépens de celui qui l'écoute. Maxime à retenir. Tout est dans la qualité du remerciement obséquieux et dans l'éloge excessif du prochain que vous reconnaîtrez celui - ou celle - qui se sert de qui semble être votre faiblesse. D'ailleurs, dans la bassesse de l'arrière-pensée, les femmes sont beaucoup plus tartes que les hommes, tant elles s'imaginent plus finaudes qu'eux...
Il est très rare qu'un auteur mort dégringole dans notre estime. Dommage qu'il n'en soit pas de même dans les relations humaines que, parfois, dans un moment d'égarement et d'aveuglement, nous appelons trop vite amitié.
C'est à la qualité des choses minuscules, dans les êtres ou les choses, que la vie (ou une oeuvre) vaut la peine d'être appréciée et reconnue dans sa valeur. Si le détail manque de finesse, soyez assurés qu'il reflète un défaut plus profond et plus grave qu'une escarbille.
S'il ne tenait qu'à moi, je ne sortirais jamais sans chapeau (j'en possède une petite collection, vestiges de la fin de mon adolescence hyper romanesque), y compris pour me rendre dans des endroits aussi vulgaires qu'un supermarché. Or, j'ai dû renoncer à cette élégante habitude à cause du commun des mortels qui semblait être par trop interloqué par mes goûts en matière de couvre-chef. C'est ainsi que je suis devenue, vestimentairement parlant, banale et que l'agitée du bocal s'est assagie. En apparence, car la tempête couve sous mon crâne. Pourtant, il me reste encore des lubies. Mais celles-ci sont peu remarquables, noyées dans l'anodin. Jusqu'à ce que l'hypocrisie et le mensonge quotidiens me fassent sortir de ma retenue. Car, voyez-vous, je prétends en plus à la sincérité en ce monde ! La mienne d'abord, à laquelle il m'arrive de manquer comme chacun d'entre nous, et aussi à celle des autres. Je ne puis qu'être déçue.
Qu'ai-je fait des leçons de Rousseau ? Finalement, je préfère de loin les objets à la plupart des êtres humains et les morts aux vivants, qui se laissent plus facilement aimer dans une perfection, celle de la finitude, quand bien même les vertus que nous leur prêtons sont illusoires.
En attendant d'avoir de la classe, je pousse cependant le raffinement jusqu'à accorder la couleur de mes bagages (un mixte entre le framboise et le rose vif, agrémenté de papillons)
à mon humeur, à mon musée Barrie (work in progress)
et à mon goût du voyage, celui que j'entreprends dans le passé de Barrie.
m'attendra à l'arrivée et Jamie, lui-même, sera installé à l'intérieur. Il jouera du trombone avec ses sourcils. Le décor sera en noir et blanc. Puis, peu à peu, nous remonterons le temps, je reprendrai des teintes qui me conviendront davantage, à mesure que nous nous éloignerons de cette époque, qui manque tant de fantaisie et de poésie, où il ne s'agit que de vendre, de se vendre. Je crois que je tiens l'une des raisons de ma passion barrienne : une certaine absence de compromis de la part d'un écrivain, qui n'avait cure de déplaire.
Il est des auteurs résolument absents de leur œuvre, du moins en apparence, car il est impossible de raconter sans donner de la voix.
La voix de l’auteur est la gueule de l’acteur, c'est son style, quand il en possède un bien sûr et qu'il ne singe pas ceux qui l'ont devancé, car il y a des caméléons et des bègues. Beaucoup d’entre eux, d'hier et d'aujourd'hui, le sont. Ce n’est pas un reproche, c’est peut-être une nécessité, quelque chose de logique et de fonctionnel. Il faut bien laisser voguer les songes pour que d’autres les adoptent, les essaient, les abîment et les abandonnent, au gré de leur fantaisie et des gammes que jouent quelques démons sur le piano de leur âme. Les auteurs portent leur histoire, la déposent dans un livre et demeurent sur le seuil, sur la pointe des pieds, pour la regarder vivre à quelque distance d’elle, de cette manière précise et ferme à la fois dont une mère regarde son enfant dormir, par la fente d’une porte entrebâillée. Chut ! Tandis que la voix d’autres auteurs se fait entendre et zèbre le récit. Barrie appartient à cette seconde catégorie.
La voix de Barrie n’est pas commune, aussi bien celle que j’entends avec mon tympan, grâce à quelques archives qui demeurent, que celle à laquelle je redonne vie avec l’eau de mes paupières qui mouillent les mots lyophilisés, endormis, depuis un siècle et plus. C'est cette tessiture particulière qui, à mon sens, est peut-être la cause d'un relatif oubli en France de cet auteur magnifique.
Le premier chapitre de Peter Pan, le roman, par exemple, possède une étrangeté qui tient à la grande proximité qu’il établit avec son lecteur. Cette familiarité feinte qu’il suscite, nous faisant croire que tout ce que nous lisons et apprenons ne sont rien d’autre que choses très naturelles, provoque un profond malaise. Cette gêne est certainement moins perceptible à l’âge adulte qu’elle ne l’est dans la grande enfance. Je me souviens avoir eu peur de Peter Pan lorsque j’étais petite fille, ne comprenant pas de quoi il retournait et ne trouvant aucune explication solide dans le déroulement de cette histoire. Or, les enfants sont des créatures éminemment logiques, même si elles sont prédisposées à l’imaginaire d’une manière plus forte et différente de leurs aînés. Elles demandent explication au réel, le provoquent en duel avec leurs âmes qui sont de farouches armes. Barrie nous laisse prendre des vessies pour des lanternes (ou des lampes pour des fées), avec un naturel fort déconcertant.
[La lampe qui aurait inspiré Tinker Bell - Cf. le livre de mon ami Robert Greenham]
« Le sommeil de l'enfance s'achève en oubli. » nous dit Hugo dans L’homme qui rit. Oui, il existe une amnésie de l’enfance, qui ne consiste pas seulement à ne point se souvenir de ses premières années mais aussi à perdre un des sens du réel, qui ne reviendra jamais et que Barrie a su, bizarrement, conserver. Le temps nous déverse peu à peu dans une personnalité qui ne cesse de se diviser, à la manière d’une cellule, et de se réunifier pour créer à chaque fois un autre être, un peu différent du précédent tout en demeurant semblable. Est-ce dans cet interstice que niche la fausseté de l'adulte, éminemment réprouvée par l'enfant ? Mais qui oserait prétendre que l’enfant n’est pas le père de l’homme qu’il va devenir, pour citer une formule de William Wordsworth, reprise en chanson par Brian Wilson ?
Barrie, lui, ne fut pas touché par ce sommeil de l'âge adulte. Il est le Prince Charmant qui vient réveiller d'un mot ou d'une phrase l'enfant en nous. Je lui rends grâce pour ce style et cette élégance.
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Catégorie : Barrie
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Dans ma valise, il y aura Rickie Lee Jones, Brian Wilson, Randy Newman et Sinatra, un livre de Barrie, la recette du conte de fées, un exemplaire du Petit oiseau blanc en guise de contribution au BookCrossing (je vais abandonner un exemplaire dans les Jardins de Kensington), l'image d'un enfant sauvage, un Moleskine et peut-être Victor Hugo (ou un fragment du journal de Samuel Pepys, en bonne lectrice de Miss Hanff).
Je vous retrouverai la semaine prochaine, selon toute vraisemblance, si les fées ne me kidnappent pas. Peut-être avant, peut-être après. Qui sait ? Je suis ici et ailleurs, toujours et jamais moi-même. Une autre.
Libellés :James Matthew Barrie,miscellanées
vendredi 16 mars 2007
Contrainte à la concision ces derniers jours pour cause d'urgence, je vous laisse quelques liens, pour vous faire part de mon admiration pour quelques auteurs-interprètes de la chanson française, qui ne sont pas tous assez présents dans les journaux et autres émissions télévisées.
Je suis persuadée de vous étonner, par un ou deux de mes choix... Et si vous pensiez déjà que j'étais ringarde, je me demande ce que vous penserez aujourd'hui... En tout cas, je m'en moque. J'aime les êtres qui portent en eux un monde et ces personnes me sont essentielles.
une plume à part, un auteur de talent, parolier de la bien connue Juliette, un artiste hors norme qui s'unit magnifiquement à la géniale femelle, mais qui ne perd rien de sa verve quand il chante lui-même ses textes. De Joyet, il faut tout écouter, et d'abord "Verdun" par exemple : ici. Mention spéciale à la chanson intitulée "Le gérontophile".
- Henri Tachan : iconoclaste, prosateur exigeant, provocateur en diable, j'aime ce type. Il y a du Brel en lui. Je suis en rage que les media ne lui accordent pas sa place.« J'aime Tachan, insolent, triomphant. Il cogne, il mord, il ravage, il saccage, il taille en pièces, il poignarde en plein cœur… Il aime, je l'aime. » (Serge Reggiani) Pour écouter certaines de ses chansons, je vous engage à vous rendre ici. J'aime particulièrement Une pipe à pépé. Car vous savez bien que les jeunes et les moins jeunes croient que les vieux (les plus vieux qu'eux) ne baisent pas et n'en ont pas besoin. On achève bien les vieux dans notre pays...
- Jean Guidoni Vous pouvez écouter sur MySpace des extraits de son dernier album. Guidoni possède une manière de mélancolie, et surtout de colère sous-jacente en laquelle j'aime me retrouver.
- Philippe Katerine, je vous en ai déjà parlé et je suis sûre que vous le connaissez. Sa folie est contagieuse et je crois que je suis pire que lui...
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- Dilettante. Pirate à seize heures, bien que n'ayant pas le pied marin. En devenir de qui j'ose être. Docteur en philosophie de la Sorbonne. Amie de James Matthew Barrie et de Cary Grant. Traducteur littéraire. Parfois dramaturge et biographe. Créature qui écrit sans cesse. Je suis ce que j'écris. Je ne serai jamais moins que ce que mes rêves osent dire.
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